Ce poème a été écrit pendant une période de galère, alors que je faisais du camping sauvage avec un ami.

Texte :

Délation

« Ils sont deux, ils sont là »
Dit la dame en combi fluo
Bien rassurée au téléphone déjà
D'entendre la voix des pistoléros.

Dans leur blanche et fidèle voiture
Ils étaient déjà passés hier
Pour me dire qu'il était sûr
Que nous serions expulsés par le maire.

Deux hommes forts, taciturnes et virils
Comme dans les séries télé
Le chauffeur barbu et débile
Comme dans les romans policiers
L'autre pas moins bête
Mais doté de la parole
M'a dit qu'il y avait des plaintes
Car notre présence les riverains affole.

Avis aux riverains polis
Et aux courtoises mégères
Il est près des bois deux sans-abris
Qui ont planté leurs tentes légères.

La dame remonte sur son vélo
Pédaler en paix, le cœur affirmé
Le corps sportif de couleurs chamarré
Et le casque en mousse, neuf et beau.
Bien difficile d'être pauvre en France
Même Dame Nature si généreuse
N'a plus droit d'abriter dans sa clémence
De jeunes isolés la misère paresseuse.

Mauvais arbres enfreignent les lois
Qu'ils protègent de la pluie
Les vils campeurs en désarroi
Qui n'ont nulle part où passer leurs nuits.

Peu évident en permanence d'éviter
L'oeil de lynx des seniors permanentés
Et d'échapper aux griffes acérées
De toutes ces quinquas manucurées.

Heureusement Starsky et Hutch veillent
Ou plutôt leur rurale version française
Afin que soit paisible le sommeil
De ceux que la vue du pauvre met mal-à-l'aise.

Ainsi font-ils régner l'implacable loi
De la peur et de la suspicion
De gens ignorants et sans foi
Gavés de journaux et de télévision.