Mission encre noire Tome 22 Chapitre 271 En ces bois profonds de François Lévesque Paru en 2017 aux éditions Tête Première. « N'allons pas en ces bois profonds / À cause des grandes fontaines / Qui dorment au fond. » Anne Hébert et Marie-Claire Blais se sont peut être penchées sur le berceau de cette jeune ado de dix sept ans. Sa mère, employée dans un bar de danseuse, essaie de noyer son passé et les extras à la maison, dans la vodka. Isabelle-Marie dissimule un sombre secret à sa fille. Elle, qui guette les hommes pressés à la sortie de la chambre maternelle, peuple ses cauchemars avec un couteau sous l'oreiller. Le décès de Louise Valois, la grand-mère maternelle agira comme un rappel à l'ordre, l'antre de la maison de Rivière-aux-Hiboux leur revient en héritage. Un sentier zigzague entre les arbres, un bout de corde est solidement attaché à une grosse branche, là, comme dans le rêve, se trouve le quai, le lac du « Grand serpent » et le souvenir du suicide collectif. François Levesque aurait-il trouvé son Styx, ce fleuve infernal ? Il est notre invité ce soir pour nous parler de cette histoire ensorcelante.
Extrait: « Grisée par le moment, je me suis accroupie. tapi sous la surface lisse...quelque chose...quelque chose d'enfoui. Et j'ai plongé mon regard dans l'eau miroitante et n'ai d'abord rien vu, rien d'autre que mon propre reflet changeant. Puis, au-delà de mon reflet, dans cette zone où tombait mon ombre, j'ai vu. J'ai vu...un mouvement. Un ondoiement. Je me suis relevée, plus surprise qu'effrayée. Non...Je n'ai pas ressenti d'effroi. Pas ressenti de peur. La peur et la folie, je laissais cela aux deux autres femmes de ma famille, la survivante et la morte. Pas d'effroi, non. Plutôt une fascination décalée, a posteriori. Évidemment, quand j'ai voulu regarder de nouveau, il n'y avait plus rien. plus rien que l'eau et mon reflet et mon ombre. Mais j'étais certaine d'avoir vu quelque chose. Quelque chose, oui. Mais quoi ? »
L'histoire de mes dents de Valeria Luiselli paru en 2017 aux éditions de l'Olivier. Huit magnifiques et séduisantes dents illustrent la couverture de ce livre époustouflant. Gustavo sanchez dit Grandroute, est devenu « le meilleur Commissaire-Priseur du monde ». Il serait inélégant de dire que sa riche épouse Flaca l'a sorti de sa pauvre condition d'agent de sécurité, en échange d'un fils. Grandroute s'empresse de les quitter pour accomplir son destin. C'est ainsi qu'il arrache toutes ses dents pour les vendre comme la propriété, jadis, de personnages illustres. L'arnaque fonctionne à merveille jusqu'au jour, fatidique, où, pris à son propre piège, Grandroute verra son fils bien décidé d'acheter son propre père lors d'une vente aux enchères au bénéfice d'une congrégation religieuse. Drôle, touffu, inventif, ce livre est un jeu, qui demande à ce que vous soyez gourmand-e-s de fantaisie débridée.
Extrait: « J'ai fait preuve d'un tel talent dans l'art de la surenchère que l'une de mes amies - la pire des quatre, une journaliste aux cheveux raides comme un paillasson d'avoir été trop teints, et les bajoues pendantes - a écrit à propos de la vente un article qui a paru dans le Miami Sun. Clairement jalouse de mon succès, car elle aussi voulait ces dents, elle a pondu un compte rendu sévère et tordu. Qu'est-ce que j'en avais à faire ? Elle ne tarderait pas à ravaler ses paroles, me suis-je dit, tandis que moi je dînerai avec les dents de Marilyn Monroe. Dès mon retour au Mexique, chacune des dents ayant appartenu à la Vénus du grand écran fut transplantée dans ma bouche par un chirurgien-dentiste de classe mondiale, le fameux docteur Luis Felipe Fabre, propriétaire de Il Miglior Fabbro, la meilleure clinique de soins et dépôt dentaire de Mexico. J'ai conservé dix de mes anciennes dents, les plus belles, pour plus tard, au cas où.»
Moebius 156 « La petite a ses choses, il va falloir la surveiller.» Les couvertures des quatre numéros de 2018 seront illustrés par la talentueuse Marin Blanc. Simon Brousseau sera en résidence d'écriture, pour sa part, cette année, il propose un essai, «Écrire contre l'habitude d'être soi». Vous trouverez dans cette nouvelle édition, des textes d'Élisabeth Arseneau, Marc Babin (Triptyque), Zéa Beaulieu-April, Virginie Beauregard D. (L'Écrou), Myriam de Gaspé, Emmanuel Deraps (L'Écrou), Véronique Hudon, Samuel Lapierre, Monique Le Maner (Triptyque), Jonathan Morier, Aurélia Peyrical, Alice Rivard (l'Écrou), Katherine Raymond (XYZ), Diane-Ischa Ross (Triptyque), Mélina Schoenborn. Je vous recommande également la lecture d'une lettre à Serge Doubrovsky signée Claire Legendre (Grasset, Hamac), ainsi qu'une fiction mélancolico-sci-fi dessinée de Vincent Giard.
Lancement du Moebius 156 le 22 janvier au bar Notre-Dame-des-Quilles sur beaubien. La revue sera en kiosque et librairie dès le 24 janvier.
Extrait:« la petite est dans les marches/à attendre presque patiente/qu'on ait réglé ses affaires/elle tient le bocal du hasard/dans le creux de son coude/et ne chasse pas les fourmis/qui remontent ses jambes/elle joue/avec les courroies de sa sandale/ce sont les sangles du monde ». Virginie Beauregard D.