Mission encre noire Tome 28 Chapitre 325. Ténèbre de Paul Kawczak à paraître le 23 janvier 2020 aux éditions La peuplade. Je vous souhaite à toutes et à tous une excellente année 2020. L'histoire a été lingcheifiée. C'est à coup de chicotte pour achever un homme que Henri Morton Stanley, le célèbre explorateur vous accueille. Tranchée, mutilée comme des corps humains, l'Afrique du roi des Belges Léopold II, en 1883, est la proie d'une haine implacable de la part des colons portés par un romantisme criminel. Paul Claes, un géomètre natif de Bruges est chargé d'officialiser le tracé des frontières disputées du Congo belge et français. Il embarque sur le Paquebot anglais le Victoria le 10 janvier 1890. C'est à bord du Fleur de Bruges, accompagné de travailleurs Bantous et d'un émigré chinois, ancien bourreau spécialisé dans l'art de la découpe humaine, le lingchi, que Paul Claes navigue sur le fleuve Congo. Xi Xiao sait lire l'avenir, il est adroit et précis lorsqu'il s'agit de vider un homme de son corps sans en altérer l'âme. Il suit le tracé complexe de lignes, guidé par des repères d'acupuncture et la prise de grosses doses d'opium. Certains dignitaires chinois y voyaient là une façon exquise de mourir. D'ors et déjà, Xi Xiao sait qu'il aimera le géomètre d'un amour suave. Ténèbre est un premier roman d'aventure stupéfiant qui distille un érotisme sombre. Laissez-vous glisser doucement dans l'effroi de la colonisation européenne en Afrique, osez changer de peau ! La piqûre sera subtile et atroce. Ténèbre est un livre virtuose et vénéneux au risque de franchir certaines limites. Je reçois Paul Kawczak, ce soir, à Mission encre noire.
Extrait: « l'angoisse et les fièvres revinrent. Pierre Claes remontait cette section du Congo encore inédite pour lui et qui, courbée comme une aorte ascendante, semblait pénétrer le coeur bouillonnant de l'Afrique qu'était le Congo. Pierre Claes, par moments, se sentait glisser dans le courant mauvais de la vie. Tout autour de lui mourait alors même que la quantité de vie grouillante sur et par-delà les berges paraissait ne trouver de limite que dans le poids du ciel. Pierre Claes se voyait couler dans le courant de ce sang brun comme le mauvais parasite qui lui rongeait les nerfs et l'assaillait en fièvres froides. Il coulait au coeur pour tuer l'existence et le goût de celle-ci se corrompait, s'infectait, devenait obscène. Il n'y aurait jamais de Dieu, cela était clair et jamais assez dit. La vie tuait la vie et tuer était mourir.»
Taverne nationale de Dominic Marcil et Hector Ruiz paru en 2019 aux éditions Triptyque poèmes. La taverne investi par les poètes est la plus vieille encore en fonction de Grandby, située sur la rue Principale et fondée en 1940. Vestige d'une autre époque, ce symbole de la culture populaire d'ici est observé, écouté, photographié et saisie sous l'angle inédit de deux plumes orfèvres. Armés de carnet de note et de stylos les auteurs recueillent des témoignages retranscrits sous forme de chroniques, de poésie, de conte, d'essai et de correspondance. Aussi fascinant qu'un instantané noir et blanc, chaque texte est un miroir de coin de bar, qui prend parfois l'allure d'un instant de grâce, ailleurs un silence qui en dit long. Une relation étrange s'établi alors entre vous, nous, eux, comme un dialogue d'outre-tombe avec un lieu à l'imaginaire éclaté. Nous passons, ce soir, par la porte arrière de la taverne pour recevoir Dominic Marcil à Mission encre noire.
Extrait: « La serveuse le serveur/n'ont pas le choix/de m'aimer/je ne suis/pas méchant/juste un peu/et puis j'oublie/souvent ton nom/je ne perds jamais mes clés/parfois la carte/as-tu déjà passé/un jour de l'An/seul au bar?»