Mission encre noire Tome 25 Chapitre 307. La minotaure de Mariève Maréchale paru en 2019 aux éditions Triptyque dans la collection Queer. La narratrice de ce roman note tout, de cette violence qui la suit depuis son enfance, des blessures dans sa tête que ses yeux ne savent pas guérir. Elle écrit à cette amie, Maude, décédée, seule au Pérou, d'un AVC. Elle lui parle, elle nous parle, car le bruit du monde ne s'en va pas. Il lui est difficile d'échapper à son bonhomme sept heures, cet homme blanc et pauvre qui s'en prend aux femmes, aux noires, aux arabes, aux gens fancy qui ne votent pas libéral, aux fifs parce qu'il est le centre du monde. Alors, la Minotaure sera son ombre, son véritable reflet. Son échappée-bête court furieusement dans son corps, gronde de souffrance et de plaisir. La Minotaure est un astre de papier lancé à pleine vitesse dans votre ciel de lecture. Un premier récit détonnant, une perle noire qui diffracte le discours éclairé de son autrice Mariève Maréchale. Elle est notre invité à Mission encre noire.
Extrait:«Cette adresse à toi m'est nécessaire pour réussir à traverser des espaces et des temps violents sans me perdre, sans m'étioler. J'ai si peur de disparaître si je reste seule. Il faut que je te dise qu'il existe une histoire d'abandons et de mensonges qui se passe de génération en génération et qui s'arrête soudainement dans la force de tempérament de mes soeurs et dans ma force d'écriture. Nous avons arrêté un siècle. Nous avons dit non. Nous avons tout fait éclater et cela sans même nous entendre. Comprends-tu, Maude?»
Des femmes savantes de Chloé Savoie-Bernard paru en 2018 aux éditions Alias Poche. Il faudrait pouvoir quitter la littérature, fermer les livres, un instant seulement nous dit l'autrice. Pour ne pas finir suicidée comme Nelly et Sylvia, pour apprendre à vivre, puissante et légère comme ces filles de cégep aux ongles vernis. Pour se laisser creuser par le désir qui élance, pour jouer à tester les limites. Pour Laissez son amant devenir le témoin de sa peau troué qui ne retient rien et surtout pas l'amour. Pour gagner sa vie, comme on la perd, nue, avec ou sans maquillage, à s'étourdir, à la merci des ordres de l'oeil inquisiteur du photographe. Oui, je, tu, elle, en ont assez de feindre. Les nouvelles de ce recueil sont un petit bouillon de poulet sans le gras, qui, petit à petit, compilent des morceaux de chair et d'âmes éparpillés dans la violence, le rejet et le silence coupable. Chloé Savoie-Bernard est d'abord une fille de Montréal et indéniablement rejeton du Mile End, elle est notre invitée à Mission encre noire.
Extrait:«J'ai souvent eu l'impression de n'avoir qu'à me pencher pour cueillir celui dont j'ai envie, Ne m'as-tu pas dit, maman, que tout le monde aime les jolies filles, ainsi black blanc beur peu importe, j'ai vérifié plus souvent qu'à mon tour la véracité de ta théorie, et presque jamais ne m'as-t-on refusé une baise. N'avais-tu pas prévu, maman, que le mélange de ta fragile beauté et de la robustesse typique des corps du mauvais versant de l'île d'Hispaniola me fabriquerait un physique aux proportions de film porno qui me condamnerait à être soit nunuche soit salope ; à cette loterie déficitaire, j'ai préféré être une catin, les corps comme le mien ne peuvent pas vraiment se payer le luxe d'une personnalité.»