Mission encre noire Tome 22 Chapitre 278. La disparition de Kat Vandale de Christian Giguère paru en 2018 aux éditions Héliotrope noir. Katherine Champagne arrive en ville fraîchement débarquée de sa banlieue en Montérégie. Elle rencontre Mélissa au Cégep, avec qui, elle s'initie en soins infirmiers et fréquente les bars de danseuses pour arrondir les fins de mois. Sa rencontre à la sortie du métro Longueuil, une virée à la ronde et une balade en Bentley plus tard avec un membre d'un gang de rue, les Cobras, va modifier la trajectoire de sa vie. Elle devient Kat Vandale, dont la crinière blond vénitien et le magnétisme ahurissant, vont faire les choux gras des amateurs de porno et des services d'escorte. Tout le monde court après Kat, les proxénètes, les clients, Mélissa, les Cobras, un parrain de la mafia...Quel secret dissimule-t-elle donc ? Qui est Kat Vandale ? Des vibrations de basses profondes s'échappent des Bentley, des flashs lumineux factices éclairent ce milieu interlope qui se faufile à travers les fissures de la métropole et de sa banlieue. Christian Giguère jette un regard convainquant sur les mélodies en sous-sol de la ville, c'est un vrai régal. À la veille du lancement de son livre à la librairie Gallimard de Montréal, l'auteur fait un détour par Mission encre noire, il nous parle, entre autre, de Laura Palmer et de David Lynch...
Extrait: «Le babillard près de la fenêtre affichait des photos autographiées par King Salomon, alias Davidson Jean-Louis, un ami d'enfance dont l'oncle Stanley était l'un des membres fondateurs du premier gang d'affiliation cobra dans le quartier. Les photos avaient été prises à Atlantic City, après la victoire de Davidson en combat de championnat. Sur la première, le champion trônait au centre du ring, le visage en sueur mais sans marques apparentes. À sa gauche, l'annonceur Michael Buffer, avec le visage impassible d'un type sorti tout droit d'un film de David Lynch, caressant son micro comme un vieux crooner ; à sa droite, Blaise Gary Toussaint, que Widmark avait longtemps considéré comme son meilleur ami, faisant office de gérant. C'est Blaise Gary qui avait trouvé le surnom de King Salomon. La légende souffrait évidemment d'hyperbole. On murmurait dans le milieu qu'elle datait de l'époque où Davidson et lui contrôlaient la vente de MDMA dans les clubs de l'est de Montréal.»
Ma ZAD de Jean-Bernard Pouy paru en 2018 aux éditions Gallimard collection Série Noire. Camille Destroit est au bout du rouleau. Le souffle court, il se remet difficilement d'une agression par d'étranges miliciens locaux. C'est décidé, il lâche la ZAD de Zavenghem, dans le nord de la France. De toute façon c'est gagné, le projet de plateforme multimodale de la puissante famille Valter est abandonné. Les boeufs en profitent pour coffrer tout le monde. Camille est pris au volant de son véhicule professionnel, il perd son boulot et sa copine le quitte. Il est temps d'aller voir ailleurs et régler ses comptes avec les Valter. Claire, jeune militante zadiste l'accompagne avec une idée derrière la tête. Jean-Bernard Pouy défend la littérature populaire à travers ses romans noirs. Déjantés, allumés, à l'humour noir grinçant, les textes de l'auteur devraient vous coller un pain en plein nez. Ma ZAD confirme cette tendance du bourre pif bien senti sur la morosité de l'époque en France. Jean-Bernard Pouy écrit punk au marqueur noir sur des partitions de Mozart. Pouy is a punk rocker.
Extrait: «Ému. cela faisait longtemps que je n'avais pas éprouvé cette petite crispation de la tête, cette boule piquante et stridente que font les nerfs sans prévenir, cette envie de chanter n'importe quoi, tiens, par exemple, Les neiges du kilimandjaro de pascal Danel. Comme la fois où j'avais découvert, au musée d'Orsay, la petite asperge de Manet, si floue, si délicate et, en même temps, plus tonitruante que le Radeau de la Méduse. Ou l'aigle géant, sur le toit de l'usine Fernet-Branca, à Saint-Louis, qui ressemble tellement à ce qu'on éprouve quand on avale la liqueur en question. Et la neige, en mai, au sommet du Canigou, derrière le château rose de Salses. L'intérieur de la pochette de Beggar's Banquet des Rolling Stones. Et, décidément, les seins d'Elsa Martinelli, le Retable d'Issenheim de Grünewald à Colmar... Sans oublier la jouissance absolue de se trouver face à un gros massif d'hortensias bleu ardoise. Des joies simples, en quelque sorte. Mais de grands moments...»
Gaza dans la peau de Selma Dabbagh paru en 2017 aux éditions de l'Aube collection Noire traduit par Benoîte Dauvergne. Gaza sous les bombes. Gaza est une bande de terre d'une quarantaine de kilomètre de long sur six ou douze de large, habitée par plus du million et demi d'individus. La famille Mujahed vit comme en prison à ciel ouvert. Le père a fui vers le Golfe. Sa famille éclatée est restée vivre ici. La mère au passé militant trouble. Sabri, l'aîné, handicapé par un attentat, résiste à sa manière et compile une histoire moderne de la Palestine. Rashid cultive son plan d'herbe et rêve de s'échapper vers Londres et sa bien-aimée. Iman, sa soeur jumelle, écoeurée par les agissements des envahisseurs israéliens songe à se radicaliser. Les bulldozers de la colonisation progressent chaque jour sur les ruines d'un peuple qui souffre. Selma Dabbagh fouille ce quotidien amer et trace des lignes de fuite impossible pour des personnages rivés à leur désespoir. Gaza dans la peau est un texte noir saisissant qui vous donne à voir des fragments de vie ignorés par les médias traditionnels. Par delà les fils de tente des terrains vagues et des piliers effondrés, il y a la mer.
Extrait: «Je suppose que Jamal relève des témoignages dans les environs de l'hôpital. J'ai laissé l'un des bénévoles qui nous ont rejoints récemment aux camps du Sud. C'est un cauchemar là-bas. Ils ont démoli une maison - enfin, une rangée de maisons -, dans laquelle la bonbonne de gaz de la cuisine a explosé. J'y suis entré pour aller chercher le vélo d'un gamin planté dehors qui la réclamait en hurlant. Il n'arrêtait pas de crier: «Mon vélo ! mon vélo !» Enfin bref, l'odeur, je vous raconte pas !» Khalil ferma les yeux et secoua la tête. « Tout ce bazar puait la fumée, le souffre, les égouts, la pourriture. Je ne peux même pas vous décrire cette odeur.» Il frissonna. « Pas la peine. Tu l'as amenée jusqu'ici, dit Rashid.»»
 
Agenda: Idles en concert le mercredi 21 mars à la Vitrola à Montréal