Mission encre noire Tome 19 Chapitre 238 Je vous souhaite une belle année de lectures et de découvertes en tout genre en 2017. Chloé Savoie Bernard publie Des femmes savantes en 2016 aux éditions triptyque. Un recueil de plusieurs nouvelles et autant de portraits de femmes, qui savent beaucoup de choses sur elles, et sur l'autre, celui qui les blesse, celui qui les asservit. Des récits de peau, par la peau, de dessous la peau alors que l'amour fait mal, et que dans ce vide existentiel qui habite les grandes villes telle que Montréal, on veut vivre, plus que survivre. Ces femmes ont bien appris la leçon, elle la connaisse. Habitées par les sons et les langues de Montréal ces nouvelles dévoilent une écriture féministe qui ausculte avec un talent incisif jusqu'à l'écoeurement ce qui nous sépare de l'autre.
Extrait:«Lorsque tu es apparu, je me suis incarnée dans tout ce que je pressentais de moi mais n'avais pu circonscrire, je savais que j'étais cette fille-là d'une manière floue et informe avant de te connaître, mais en t'aimant j'ai laissé tomber plusieurs mues et j'ai surgi dans toute ma splendeur, vulnérable, scarifiée, tu m'as prise et placée au coeur de ma douleur.»
Une mort en vaut la peine de Donald Ray Pollock paru en 2016 aux éditions Albin Michel. Déjà porté par le succès retentissant de son précédent ouvrage: Le diable tout le temps, Donal Ray Pollock renoue avec le roman épique, sauvage et grotesque. Nous sommes en 1917, l'armée américaine embarque pour l'Europe. Les frères Jewett profite de la mort de leur père dévot, pour rompre avec la misère en braquant des banques. À l'heure du journalisme à sensation naissant, ils deviennent rapidement les hommes à abattre pour tout un coin de pays. Donald Ray Pollock retourne une fois plus sur ses terres, si connu, pour un roman bien dans la tradition de la littérature du sud. Grotesque, absurde parfois, l'univers de ces hommes et de ces femmes est sauvage. Comment survivre à une amérique moderne qui nait dans le chaos ? Une mort en vaut la peine est une oeuvre vibrante et tragique qui vous laissera sans voix.
Extrait:«Il était plus de minuit lorsqu'ils quittèrent la cabane pour s'engager dans la pinède en direction de la propriété de Tardweller. Ils avaient décidé d'abandonner derrière eux la plupart de leurs affaires et de n'emporter, en plus des deux livres ou encore de leurs couvertures, que le vieux fusil Pearl, ainsi que son rasoir et les deux machettes. Une demi-lune d'un jaune cireux leur éclairait le chemin. Une fois parvenus à l'orée du jardin, ils s'immobilisèrent dans un boqueteau pour guetter d'éventuels signes de vie en provenance de la demeure plongée dans le noir. À l'exception du chant des grillons et du gargouillis de leurs intestins, le silence était absolu. «J'ai jamais rien volé de ma vie», geignit Cob d'un air malheureux.» 
Born to run de Bruce Springsteen paru chez Albin Michel en 2016. Bruce Frederick Joseph Springsteen est né en septembre 1949 à Long Branch (New Jersey). Je ne sais pas pour vous, pour ma part j'ai toujours eu une relation ambigu avec le personnage. Champion des grands stades, il est aussi l'interprète des albums Nebraska, de Darkness on the edge ot town (Badlands) et de Born to run. Entre récits intimes et confessions, Bruce Springsteen se livre à l'exercice de l'autobiographie avec le style direct qu'on lui connaît dans ses chansons. Un livre pour tout ceux et celles qui se demandent encore comment cela se fabrique une rock star, surtout quand il se pose encore lui-même la question.
Extrait:«Dans ma vie de jeune musicien, une vie de bohème que m'imposaient les circonstances, il n'y avait, comme je l'ai dit, ni drogue ni alcool. Un de mes anciens colocataires, un guitariste, mettrait un terme à sa déchéance en se tirant une balle dans la tête ; après une courte existence passée à intégrer des susbstances chimiques, il avait gâché son talent et fini clodo. J'avais trop vu de gens mentalement délabrés, à la ramasse, et qui ne reviendraient jamais à une vie normale. Alors m'empoisonner l'organisme avec des saloperies, même pas en rêve. J'avais besoin de contrôler ce qui se passait, j'avais besoin de ces limites qui avaient déjà tendance à trop facilement s'estomper. J'avais peur de moi, de ce que je risquais de m'infliger, de faire ou de ce qui risquait de m'arriver.»
 
Revue Liberté #314 Hiver 2017 est en kiosque ! Dossier: Prendre la littérature au sérieux