Mission encre noire Tome 24 Chapitre 293. Les bains électriques de Jean-Michel Fortier paru en 2018 aux éditions La mèche. Renée n'a jamais rêvé ! Pourtant, certaines des villageoises, telle Céleste, jurent l'avoir croisé, somnambule dans la forêt, la nuit. C'est que La vieillissante Madame Sainte-Colombe lui a confié un ouvrage au titre bien curieux: La science des rêves. Louise Beurre dit Louisa Louis revient d'un périple de plus de dix ans de part le monde à la suite d'un cirque puis d'une troupe de théatre, en tout cas c'est ce qu'elle raconte. Elle est sans le sou et redécouvre son village, ses rumeurs et une sororité tissée serrée autour de Rénée lépine, sa grande amie, Belle Guénette, Céleste, Margot, Ginou et la veuve Clot. Passant leur soirée à taper des jeux de cartes, les femmes tiennent le fort au village. Employée au magasin général, veuve, logeuse ou domestique, aucune n'occupe un emploi aussi picaresque que Rénée: gardienne de bains électriques. Roman d'une fantaisie créatrice rafraîchissante, Les bains électriques, emprunte à plusieurs registres, celui du polar, du conte et du fantastique. Je vous propose de coudre et découdre le style truculent de l'auteur, Jean-Michel Fortier est notre invité. 
Extrait: «Céleste la malingre rentrait toujours chez elle en coupant par la forêt. Elle-même branche, elle évoluait aisément dans les bois drus du comté. Deux fois plus rapide que la route, ce raccourci, car la route contournait tout le village avant de filer vers Spencer Wood, Une fois qu'elle avait traversé la forêt - les arbres meublaient une bande d'une largeur d'un mille - elle jaillissait sur son terrain tel un diablotin, à une centaine de pieds de sa maison. À force de coudre et de découdre le chemin, Céleste empruntait le même axe exactement, toujours. Elle ressentait rarement la peur. Pour n'avoir jamais connu de réel danger, tout d'abord, mais aussi pour n'avoir jamais redouté la mort. C'était le grand repos, qui viendrait après la grande besogne. Tout le contraire de sa défunte mère, qui l'avait toujours accueillie en sursautant, «Ma Céleste, c'est toi, je pensais que tu étais morte», elle chignait jadis, une goutte au bout du nez, penchée au-dessus d'une marmite.»
Néons et Sakuras de Alice Michaud-Lapointe et Ginette Michaud paru en 2018 aux éditions Héliotrope. En japonais, Nihon signifie Japon, Hounou: offrandes. C'est un peu l'idée insolite de ce carnet de voyage, où l'échange intime d'une mère et sa fille, à travers l'écrit, au pays du soleil levant, rencontre les trajectoires brisées de la découverte d'une culture qui ébranle les sens. Les deux autrices s'étaient fait la promesse de regarder les fleurs de cerisiers lors de l'Hanami. Le japon s'offre alors à vous sous plusieurs aspects insolites, des Sampurus en vitrines, l'omniprésence des masques sur les visages, l'histoire de la statue du chien Hachikô, le dîner spectacle Teppanyaki, les yeux pénétrant d'un robot nommé Pepper. Agrémenté d'anecdotes délicieuses et de réflexions personnelles, ce carnet nous permet de mordre à pleine dents dans cette expérience du voyage à deux. Dans la proximité imaginaire du tableau de Kanagawa (1831), La grande vague, j'accueille Alice Michaud-Lapointe à Mission encre noire.
Extrait: «Ce que je mange, chair crue ou cuite, revient me mordre, me dévorer. Manger l'autre, c'est ingérer, intérioriser, incorporer, et c'est toujours par la bouche, celle qui parle aussi, que se manifeste cette limite ambivalente, soudain exacerbée quand on se retrouve en pays inconnu. L'oralité - la faim, la langue - est le moment de la vérité, la bouche de la vérité, là où le désir de l'autre s'ouvre...se ferme. Nous ne voulons pas trop penser à ce qui se passe en nous une fois introduit, mâché, sucé le corps étranger. L'autre qui nous met l'eau à la bouche, l'autre, le même parfois, qui nous soulève le coeur de dégoût. Manger vivant, manger l'autre en tant que vivant, cette pensée ne cesse de rôder et de nous hanter ici.»