Mission encre noire Tome 24 Chapitre 296. Aux premiers temps de l'Anthropocène d'Esther Laforce paru en 2018 aux éditions Leméac. Anthropocène: l'âge de l'homme, l'époque de l'histoire de la terre où l'impact des activités humaines a un effet durable sur l'écosystème. Émilie ressent la force destructrice de ce phénomène sur sa vie. Sa soeur se meurt d'un cancer et ne devrait pas y survivre. Archéologue, Elle s'effondre soudainement sur les fouilles de ruines en Grèce. La progression fulgurante de la maladie de Mélissa terrasse Émilie qui se réfugie dans l'écriture de lettres à sa soeur. Son passé et son présent deviennent, alors, un carnet d'observation de la fin de ce monde. Au-delà de ses envies d'enfant anéanties, de sa solitude, de ses amours avortés, du bruit du monde, elle garde un peu d'espoir. Il se garde un souffle mélodieux sur ce petit bijou de roman d'à peine cent pages. Dans un monde de chagrin, Esther Laforce, munie d'une plume délicate et d'une grande élégance, nous invite à danser sur le bord du volcan. Elle est notre invitée à Mission encre noire.
Extrait: «Il y avait aussi une odeur. Elle n'avait rien d'animal. Enrobé d'effluves de Kérosène et d'essence, l'ammoniac émanait du lisier répandu dans la campagne alentour. La puanteur semblait suinter de partout. Mais tu sais ce qui m'a le plus frappée? Tout le long de la route, il y avait des cadavres de petits animaux morts. Des ratons laveurs, des porcs-épics, des marmottes, des mulots, des oiseaux, un renard même: sur environ trois kilomètres, j'ai vu toute une ménagerie sylvestre, des petits corps frappés, éventrés, était inodore, baignée par les miasmes des porcheries. Même le corps d'une moufette aplatie au centre de la route ne dégageait aucun relent particulier. J'ai quitté l'entrée de la porcherie, là où le sourire du cochon brûlait sous un soleil dont rien n'atténuait ni ne tamisait l'éclat. Aucun arbre n'avait été planté pour ombrager et agrémenter l'allée qui conduisait à des bureaux administratifs.»
Une douce lueur de malveillance de Dan Chaon paru en 2018 aux éditions Albin Michel. Dustin Tillman est psychologue dans la banlieue de Cleveland, Ohio. Père de deux enfants, Aaron et Dennis, aux côtés de sa femme Jill, ils coulent une vie paisible. Une angoisse forte et diffuse le prends soudainement. le quadragénaire apprend la libération de son frère adoptif, Dusty, condamné à perpétuité pour le meurtre de leurs parents et de deux proches. Les tests ADN sont formels, il est innocent. Un ancient flic, en arrêt maladie vient le consulter. Il enquête sur le supposé serial killer Jack Daniels, qui a pour habitude de noyer des jeunes étudiants capturés à la sortie des bars. Brusquement, sa vie personnelle se dégrade, Dustin est confronté à l'annonce du cancer de sa femme et de la dépendance aux drogues dures d'un de ses fils. Dan Chaon réussi avec talent à nous attirer vers les grands fonds de la psychologie humaine, à la limite de la folie. L'auteur a été élu parmi les meilleurs romans de l'année un peu partout aux États-Unis. Un roman obsédant !
Extrait: «Tu pénètres dans l'immeuble de Cleveland Heights à huit heures du matin, tu grimpes l'escalier de marbre des années vingt avec sa boule en cuivre, tu parcours les étroits couloirs avec leur rangée de portes fermées et seule celle de ton cabinet est ouverte et la musique s'échappe de la cascade d'intérieur et tu t'arrêtes sur le seuil. «Il y a quelqu'un?» demandes-tu? Et tu sens la franche hostilité de la pièce, qui refuse toute présence. Tu sais, biens ûr, que ce n'est qu'une illusion. L'esprit est trompé par toutes sortes de stimuli et le stress aggrave les choses. Mais la pièce te déteste. Tu le sens.»
Le nouveau numéro de Moebius 159 est disponible en kiosque.«Cet animal m'a donné la vie», c'est le citation-thème tirée de Le feu de mon père de Michael Delisle paru chez Boréal en 2014. Sous la direction éclairée de Clara Dupuis-Morency et Gabrielle-Dulude, venez découvrir les formes variées et inédites que peut prendre l'animalité, bien ou mal placée, dans ce splendide laboratoire d'écriture. Vous pourrez y trouver des textes de Anne-Renée Caillé, Jean-Philippe Chabot, Marie-Hélène Constant, Marie-Ève Fleury, Kristina G. Landry, Catherine Lemieux, Catherine Morency, Camille Readman Prud'homme, Martin Tailly, Anne-Marie Alonzo, Marilou Craft et Simon Brousseau.
Extrait: «Je suis à fendre/On tournera autour et tu seras patient/Pointu de douceurs/J'ai un homme dans le coeur une femme sur le dessus/C'est une laine qui embrasse et pique lentement.»
Du 14 au 19 novembre 2018, c'est le temps du Salon du livre de Montréal qui bat son plein jusqu'à lundi. Il y en a pour tous les goûts. Mission encre noire vous propose une visite guidée de cette édition pour vous donner l'envie de visiter cette ville de papier, de maisons d'éditions et d'écrivain.e.s.