C dans l'air du 30 mars 2024 - Attentat, boycott russe : menaces sur les JO

Les répercussions de l'attentat de Moscou se font déjà sentir en France. Deux jours après l'attaque au Crocus City Hall qui a fait 143 morts en Russie, Matignon a décidé de relever le plan Vigipirate au seuil d'alerte attentat, le plus élevé sur l'échelon. À moins de quatre mois du début des Jeux olympiques de Paris, le gouvernement ne veut prendre aucun risque. Cette semaine, la Pologne a annoncé l'envoi à Paris d'une task force dans le cadre d'une coalition internationale pour renforcer la sécurité de la compétition : "Une force opérationnelle composée de nos soldats, y compris avec des chiens renifleurs, sera déployée à Paris. Son objectif principal sera d’entreprendre des opérations de détection d’explosifs et de lutte contre le terrorisme", a déclaré sur X le ministre de la Défense polonais, Wladyslaw Kosiniak-Kamysz. De son côté, l'armée française se concentre sur les deux menaces qu'elle considère comme prioritaires pour ces Jeux, les cyber-attaques et les attaques de drone. "La menace cyber va être multipliée par dix", a estimé le Comité d’organisation des jeux olympiques. Quant aux drones, "C'est sans doute l'attentat de demain", a alerté le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, début mars. Considéré comme l'un des pays en pointe dans l'appréhension de cette menace, la France investit depuis quelques années des centaines de millions d'euros dans des dispositifs de brouilleurs, de laser ou de filet anti-drone, à l'image du SkyWall Patrol, présenté à la presse sur la base militaire de Villacoublay (Yvelines) le 14 mars dernier.

Une chose est sûre, le climat géopolitique est particulièrement instable à 3 mois et demi de la compétition. Le Comité international olympique (CIO) est d'ailleurs engagé dans un bras de fer avec le président russe Vladimir Poutine qui l'accuse de "basculer dans le néonazisme", au lendemain des nouvelles restrictions concernant les sportifs russes pour les JO de Paris 2024. Le CIO vient en effet d'interdire les athlètes russes et biélorusses de parader lors de la cérémonie d'ouverture. L'instance internationale accuse également Vladimir Poutine de vouloir saper le succès des Jeux, en organisant dès septembre des Jeux de l'amitié à Moscou et à Ekaterinbourg, où plus de 70 pays devraient être représentés. Une provocation pour le CIO qui qualifie le projet de "tentative cynique" de la part de la Russie d'exploiter les athlètes "à des fins de propagande politique".

À Paris, l'accueil des Jeux continue aussi de diviser fortement, entre la hausse des prix du logement, le coût exorbitant de la compétition ou encore le nettoyage social de la ville que dénoncent les associations. Lundi, Serge Grouard, le maire d’Orléans s'est emporté contre l’arrivée de 500 migrants sans abri, "déplacés en catimini" depuis l’été avant les JO. Selon lui, un car affrété par les services de l’État transférerait toutes les trois semaines entre trente et cinquante sans-abris depuis la capitale, débordant les dispositifs d’hébergements d’urgence. Une nouvelle polémique qui s'inscrit dans le contexte des SAS régionaux créés par le gouvernement depuis l'été dernier pour orienter les migrants en attente d'évaluation de leur situation administrative hors de la capitale, où le dispositif d'hébergement d'urgence est structurellement saturé. Invitée à s'exprimer sur le sujet dans l'émission Complément d'enquête ce jeudi, la ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castera a assuré que la situation d'Orléans "n’a rien à voir avec les Jeux olympiques", mais qu'elle "vise à répartir l’effort sur différents territoires". La même réponse opposée par l'État aux associations qui l'accusent de "nettoyer" la ville pour les Jeux. Pour tirer au clair cette affaire, la Défenseure des droits Claire Hédon a annoncé fin janvier l'ouverture d'une enquête sur les "risques d'atteintes aux droits et libertés ainsi que d'éventuelles situations de discrimination". Ses conclusions sont attendues en avril.

Quelles seront les principaux risques sécuritaires lors des Jeux olympiques de Paris ? Faut-il exclure les athlètes russes de la compétition ? Et l'État procède-il vraiment à un "nettoyage ethnique" de la ville de Paris ?

LES EXPERTS :
- YVES THRÉARD - Éditorialiste, Directeur adjoint de la rédaction - Le Figaro
- SYLVIE MATELLY - Économiste, directrice de l’Institut Jacques Delors
- MARIE-CÉCILE NAVES - Politologue, directrice de recherche à l'IRIS
- DRISS AIT YOUSSEF - Docteur en droit public, spécialiste des questions de sécurité