C dans l'air du 15 février - Directeur de "L'Express"... et espion du KGB !

"L'un des plus grands espions soviétiques de la Ve République." C'est ainsi que le magazine L'Express a qualifié Philippe Grumbach, son ancien directeur, décédé en 2003. Dans une enquête parue ce mardi, L'Express raconte avoir été dirigé pendant une quinzaine d'années par l'un des principaux agents du KGB en France lors des années 1970. Une révélation d'autant plus dérangeante que le directeur de L'Express s'est révélé très proche de plusieurs homme politiques influents, de François Mitterrand à Pierre Mendès France, qui lui donnait du "Mon cher ami", en passant par Valery Giscard d'Estaing, alors président de la République. Philippe Grumbach a même failli être nommé directeur d'Antenne 2. Un poste qui aurait été idéal pour rapporter aux Kremlin ce qui se passait au plus haut niveau de l'appareil politique français. Philippe Grumbach n'ayant jamais été pro-communiste, hormis dans sa jeunesse, il n'a jamais éveillé les soupçons. C'est finalement 30 ans après la fin de la guerre froide, et grâce aux archives de la prestigieuse université de Cambridge, que les journalistes de L'Express sont parvenus à mettre la main sur la double vie de leur ancien directeur.

Les techniques de désinformation soviétiques, elles restent bien d'actualité. Ce lundi, le nouveau ministre des Affaires étrangères français, Stéphane Séjourné, a convié ses homologues allemand et polonais à une réunion au château de La Celle-Saint-Cloud pour discuter de la lutte contre la désinformation venant de la Russie. On connaissait les activités de déstabilisation de la société paramilitaire Wagner en Afrique francophone, mais la Russie cible maintenant directement les citoyens français sur leur territoire. Le hashtag #boycottJO2024, les centaines de pochoirs d'étoiles de David retrouvés sur les murs parisien en octobre, la panique sur les punaises de lit dans les cinémas français… toutes ces polémiques qui ont agité notre actualité ces derniers mois sont suspectées d'avoir été orchestrées par la Russie. Stéphane Séjourné a même dévoilé l'existence d'un réseau de propagande, baptisé "Portal Kombat" qui "diffuse des contenus pro-russes valorisant l’invasion russe en Ukraine et dénigrant les autorités ukrainiennes". À quatre mois des élections européennes, le ministère des affaires étrangères a annoncé "renforcer les coopérations avec ses partenaires" pour éviter de nouvelles tentatives de manipulation de l'opinion publique.

Il n'y a pourtant pas que la Russie qui inquiète les services secrets occidentaux. Dans l'ombre de son voisin russe, la Chine se livre abondamment au renseignement. Après l'envoie de ballons espions au-dessus du territoire américain, c'est aujourd'hui l'espionnage économique qui inquiète les grandes puissances. Dès juillet 2022, les chefs du FBI et du MI5 avaient évoqué des signaux laissant penser que Pékin préparerait son économie à résister à des sanctions économiques en cas d’attaque armée de Taïwan. Le FBI suspecte même l'équipementier télécoms Huawei d'avoir voulu dissimuler une base d'espionnage dans un jardin chinois qui devait être construit à proximité du Capitole. Un projet finalement avorté. En mars 2023, deux Français et deux Chinois ont été mis en examen à Paris, parmi lesquels deux dirigeants d’une entreprise de haute technologie. Ils sont soupçonnés d’avoir livré sciemment des informations sur des technologies sensibles à la Chine et à la Russie. De son côté, la Chine, qui espère devenir la première puissance économique mondiale dans les prochaines décennies, multiplie les arrestations d'étrangers soupçonnés d'espionnage économique sur son propre sol. Certaines entreprises japonaises, américaines ou encore françaises incitent désormais leurs salariés à rentrer au pays.

Qui était Philippe Grumbach, intellectuel français et espion au service du KGB ? Comment la Russie tente-elle de manipuler l'opinion publique à quelques mois des élections européennes ? Et pourquoi l'espionnage commercial chinois inquiète les services de renseignement internationaux ?

LES EXPERTS :

- Général Christophe GOMART - Ancien directeur du renseignement militaire, ex-commandant des opérations spéciales
- Jean-Dominique MERCHET - Éditorialiste à L'Opinion, auteur de "Sommes-nous prêts pour la guerre ?" (Janvier 2024, Robert Laffont)
- Stéphanie DUNCAN - Journaliste à France Inter, auteure du podcast "Espions, une histoire vraie"
- Anthony BELLANGER - Éditorialiste à France Info TV, et spécialiste des questions internationales