Le "Monopoly", dont les versions ne cessent de se multiplier, est sans conteste l'un des jeux de société les plus célèbres. On a longtemps cru qu'il avait été inventé, en 1933, par un chômeur américain, Charles Darrow, alors que son pays subissait de plein fouet la Grande Dépression.
Or il n'en est rien. Si le jeu baptisé "Monopoly" est bien dû à Charles Darrow, celui-ci s'est inspiré, pour le créer, d'un autre jeu, mis au point par une femme.
Elle se nomme Elizabeth Magie. Née en 1866, elle devient sténographe et secrétaire, ce qui ne l'empêche pas de s'essayer à la poésie et au théâtre. Mais c'est aussi une militante.
Elle dénonce la condition des femmes et, fidèle aux idées de son père, qui critiquait l'enrichissement abusif des propriétaires fonciers, elle prétend que le seul possesseur d'un bien devrait être celui qui l'a créé.
En 1903, Elizabeth Magie dépose un brevet pour un jeu de son invention, le "Landlord's game", le "jeu du propriétaire foncier". Son but premier n'est pas de distraire ses contemporains.
En faisant une partie de "Landlord's game", les joueurs doivent comprendre à quel point les propriétaires fonciers accaparent les richesses. Et plus généralement les propriétaires de monopoles, comme John D. Rockfeller par exemple, qui contrôlent des pans entiers de l'économie.
À une époque où l'économie n'est guère enseignée à l'école, ce jeu doit en apprendre les règles aux joueurs. La pédagogie par le jeu, sur ce point aussi, Elizabeth Magie était plutôt en avance sur son temps.
Très optimiste, la conceptrice du jeu pensait que les enfants, instruits par leurs parties, mesureraient les injustices du système économique et chercheraient à y remédier une fois devenus adultes.
On redécouvrira le "Landlord's game", et son influence sur le "Monopoly", dans les années 1970. C'est l'économiste Ralph Anspach qui, accusé de plagier le "Monopoly" et amené à faire des recherches pour assurer sa défense, tire le jeu de l'oubli. Il pourra dès lors dénoncer ce qu'il appela le "mensonge du Monopoly".
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