Même s’il est essentiel à l’existence humaine, le commerce va devoir affronter un problème majeur qui est celui de la déliaison sociale. Il ne s’agit pas seulement de la fameuse crise du lien social, mais plus généralement d’une sorte de défiance généralisée qui caractérise une société qui a finalement accepté sans broncher le masque, alors qu’elle a longtemps débattu sur le statut du voile. La déliaison sera ici entendue comme un dérangement, le commencement d’une séparation ou de désunion plus ou moins prononcé (survenant à l’origine dans les pièces de construction d’un navire). Pour autant la déliaison peut avoir des effets bénéfiques, permettant par exemple de restituer une part de liberté rendant possible l’intégration de la surprise, du changement et surtout de nouvelles liaisons. Partant de là, l’objet de cette intervention est de remettre en cause deux principes essentiels de l’économie des marques. D’une part, la survalorisation de l’émotion et du pathos dans les relations marchandes largement structurées autour d’un idéal de l’amour romantique. De l’autre, une glorification du grandiloquent, du grandiose, du spectaculaire. Contre les dérives du pathique et de l’emphatique, il s’agira de proposer une lecture microsphérique de la vie marchande. Loin de toute hypertrophie des médiations marchandes, il sera question de saisir la multiplicité des figures du butinage, de l’arpenteur en explorant les registres marchands du phatique et de l’empathique. En s’inspirant des montages cinématographiques, l’objectif sera d’observer et de saisir ces petits liens de la vie marchand, ces petits faits jugés subalternes qui nous surprennent et suscitent la discrétion, la sobriété. Non ce qui se manifeste dans l’irruption foudroyante et provoque la sidération, mais ce qui s’entrevoit dans la réserve, le retrait ; les tous petits mouvements à la lisière de ce qui fait sens, permettant une lecture micrologique de la consommation.