Une conférence d'Ignatus

Dans la France des années soixante, encore guindée et fascinée par les grands médias et le plaisir de la consommation, la chanson se limite encore souvent à la variété et à la chanson à texte. Les influences du jazz et du rock ont commencé à faire bouger les lignes, mais le conformisme reste de rigueur. Mai 68 sera comme un électrochoc et symbolisera l’émergence d’artistes désireux d’emmener les textes chantés vers de nouveaux territoires.

Porté par les vents nouveaux, Léo Ferré s’apprête à mettre de la pop dans sa chanson poétique et s’affiche en ardent soutien des combats du moment. Jean Ferrat, très marqué par Cuba où il a séjourné, fait de même. A leurs côtés, on trouve Henri Tachan et quelques autres.

On se souvient de Jacques Higelin et Brigitte Fontaine, toujours en activité. Mais ces deux magnifiques et incontournables « arbres » cachent une forêt de musiciens au culot et à la folie contagieuse : Catherine Ribeiro + Alpes, Evariste, Alan Jack...

Colette Magny, Leny Escudero, François Béranger... Ces interprètes s’éloignent des sirènes du show business pour mieux partager leurs convictions. Parallèlement se créent des groupes basés sur l’engagement politique comme le Groupement Culturel Renault.

Si Le Chant du Monde a été aux avant-postes (Ferré y enregistre dès les années cinquante), le milieu des années soixante voit fleurir de nouveaux labels entièrement dédiés à la création comme les Productions Mouloudji. Quant à Saravah, fondé par Pierre Barouh, c’est le parfait symbole d’une époque en train de basculer.

L’impact de mai 68 se fait ressentir tout au long des années soixante-dix pendant lesquelles de nombreux artistes vont s'engouffrer dans ce qui ressemble à une brèche grande ouverte : Mama Béa, Dick Annegarn, Albert Marcoeur, Jac Berrocal, Christophe, Gérard Manset... Pas de doute, la société change, et sa bande-son aussi.

Jérome "Ignatus" Rousseau

Après avoir étudié le piano classique puis le jazz, Ignatus commence sa carrière professionnelle à la fin des années 1980 en tant qu'auteur-chanteur du duo Les Objets. Après la séparation du groupe, il se choisit le pseudonyme "ignatus" en s'inspirant du héros du livre La conjuration des imbéciles de John Kennedy Toole et fait des concerts seul à la guitare et avec un clavier relié à un échantillonneur. Il auto-produit un CD 4 titres "Seul" et monte son label, Ignatub, en 1997, pour sortir son premier album "L'air est différent".

En 2015, il monte le projet [e.pok] avec Nicolas Losson (musique électro-acoustique), Hervé Le Dorlot (guitare) et Jérôme Clermont (vidéos) : "Une performance aux frontières de la musique expérimentale, de la chanson et de l’art-vidéo". Ce projet est élu "Coup de coeur 2018" de l'académie Charles Cros.

Parallèlement à sa carrière de musicien, Jérome Ignatus Rousseau continue de donner des conférences, notamment pour les Francofolies ou les Transmusicales de Rennes par exemple.