Vous êtes de plus en plus nombreux à utiliser le podcast comme médium pour travailler avec vos élèves. Que ce soit pour produire du contenu avec eux dans le cadre d’une webradio par exemple, ou pour créer des supports pédagogiques, le podcast est un outil efficace.

Pour cet épisode d’Extra classe, nous vous proposons de découvrir le travail de Jérôme Boruszewski, professeur des écoles travaillant au lycée français d’Amman en Jordanie. Il vous fait découvrir ses fictions radiophoniques « les yeux fermés », ainsi que les usages pédagogiques que son travail permet. Une œuvre très originale, qui puise son inspiration dans la cour de récréation et qui s’appuie sur la pédagogie de l’écoute de Pierre Péroz.

  • Les Yeux fermés, les podcasts pédagogiques de Maître Jérôme. À écouter sur le site Audioblog Arte radio.

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La transcription de cet épisode est disponible après les crédits.

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Extra classe, des podcasts produits par Réseau Canopé.

Émission préparée et réalisée par : Aurélie Dulin

Directrice de publication : Marie-Caroline Missir

Coordination et production : Hervé Turri, Luc Taramini, Magali Devance

Mixage : Simon Gattegno

Secrétariat de rédaction : Anne-Sophie Carpentier

Contactez-nous sur : contact@reseau-canope.fr

© Réseau Canopé, 2022


Transcription :

Je m’appelle Jérôme Boruszewski, je suis professeur des écoles. Je suis maître en classe de CE2 et je travaille au lycée français international d’Amman, l’école française installée à Amman, la capitale de la Jordanie.

Moi, je travaille à la petite école, à l’école primaire, et la plupart des élèves que nous accueillons sont des locaux. Dans ma classe à moi, j’ai surtout une majorité de Jordaniens. Cet attrait pour l’étranger me vient, je pense, de mon adolescence. À ce moment-là, j’avais très envie de parcourir le monde, découvrir le monde. Je suis parti tout d’abord en Catalogne espagnole pendant un mois, tout seul, et puis l’année d’après en Nouvelle-Calédonie. Très vite, j’ai beaucoup aimé me poser des questions, rencontrer des gens pour essayer d’y répondre, parcourir des régions éloignées. C’était lié à mon projet professionnel pour devenir journaliste.

J’ai commencé mon travail en tant que journaliste. Tout d’abord, deux ans à Paris, et puis, assez vite, je me suis expatrié. Je suis allé m’installer au Cambodge où j’ai été correspondant pour les radios francophones publiques, et également pour des journaux et des télévisions.

Après six ans de correspondance au Cambodge, je suis allé m’installer à Rangoun pour être correspondant en Birmanie où je suis resté un petit peu moins de cinq ans. Depuis 2017, je suis installé à Amman, en Jordanie. Donc j’y ai été correspondant également à mon arrivée, et puis ensuite, je suis devenu maître. J’ai passé le concours d’instit, que j’ai eu, et j’ai été recruté à l’école française en classe de CE2. Voilà.

[Extrait du podcast Les Yeux fermés, « Nathan et Joris au bord du lac 2/4 »]

« [Bourdonnement d’insectes. Un oiseau chante. Une feuille de papier qu’on déchire. Percussions...]

NARRATEUR : Ferme les yeux, s’il te plaît. Qu’est-ce que tu vois ?

NATHAN : Je vois du beau pays, des carottes.

JORIS : Rien.

NATHAN : Euh... Je vois des…

NARRATEUR : Rien du tout ?

JORIS : Non... ?

[Rire d’enfant.]

NARRATEUR : Bonjour. Tu as sans doute déjà écouté le premier épisode de ‟Nathan et Joris au bord du lac”. Aujourd’hui, je te propose d’écouter la suite. Rappelle-toi, Nathan… »

[Fin de l’extrait]

Les Yeux fermés, c’est un podcast qui rassemble des fictions radiophoniques que j’écris, que j’enregistre avec des voix d’acteurs et que je mets en ligne sur Audioblog, la plateforme d’Arte radio. Sur ce podcast, les enfants peuvent écouter ces histoires. La spécificité, c’est que je leur pose une question à la fin de l’épisode : une fois qu’ils ont écouté l’histoire, qui peut être en un seul épisode ou en plusieurs, je leur pose une question et ils ont la possibilité de répondre en utilisant la messagerie instantanée du téléphone portable de papa ou de maman par exemple. Et moi, j’ai un numéro dédié, je reçois toutes les réponses des enfants et je réponds à tous ceux qui participent.

Quand j’ai commencé mon travail de maître en CE2, j’avais une classe nombreuse, 30 élèves, et c’était... C’est assez difficile de donner la parole à tout le monde et de faire travailler l’oral à tout le monde dans une classe nombreuse, alors que c’est un objet d’enseignement à part entière dans les programmes de français de l’Éducation nationale, autant finalement que l’écriture ou la grammaire ou d’autres choses. Je me suis dit que mon ancien métier de journaliste radio pouvait peut-être permettre d’ouvrir des espaces nouveaux, pour faire en sorte que les élèves s’expriment sans avoir la contrainte de la classe et trouvent des moyens d’expression beaucoup plus libres. Donc j’ai eu l’idée de créer des histoires radiophoniques et je me suis rendu compte que beaucoup d’élèves qui étaient petits parleurs, finalement, ont trouvé là un espace pour s’exprimer et pour progresser. Et je n’arrivais pas à leur donner cet espace-là dans ma classe.

[Extrait du podcast Les Yeux fermés, fin de l’histoire « Une clé dans un œuf »]

« [Ronronnement du moteur d’un appareil électrique. Quelqu’un tousse.]

UN ENFANT : Maman, le gâteau est cuit.

NARRATEUR : C’était ‟Une clé dans un œuf”, une fiction Les Yeux fermés, écrite et réalisée par Maître Jérôme. Maintenant, je vais te poser une question : à ton avis, dans quels endroits les deux enfants sont-ils passés ? Tu peux me répondre… »

[Fin de l’extrait]

Alors ça, c’est l’histoire « Une clé dans un œuf », la première histoire que j’ai diffusée sur mon podcast, qui est une histoire très énigmatique, quasiment uniquement en sons. Il y a très peu de dialogues, pas de narration, donc il y a beaucoup, beaucoup à imaginer. Je vous propose d’écouter la réponse à la question que je pose à la fin de l’épisode, une réponse du petit Alexis, qui était en grande section de maternelle quand il a écouté cet épisode.

[Extrait de la réponse envoyée par Alexis, grande section de maternelle]

« ALEXIS : Euh...

MÈRE D’ALEXIS : Fais une phrase.

ALEXIS : Ils ont entendu de l’eau. Après, ils ont retenu leur respiration et ils sont sortis du Thermomix. Au revoir. Signé : Alexis. »

[Fin de l’extrait]

Moi, quand je reçois ça le soir en rentrant de l’école, ça me fait craquer, ça me donne vraiment envie de continuer. Surtout que le petit Alexis, je ne le connais pas, je ne sais pas… je ne sais pas qui c’est. C’est peut-être un ami d’amis d’amis. Je ne sais pas comment il a connu l’existence de mon podcast, mais ça crée… la radio crée comme ça des liens entre des personnes qui ne se connaissent pas au départ, et je trouve ça vraiment magique.

Au travers de cette activité, je pense que je lui fais travailler des compétences de compréhension, d’expression orale. Je lui fais travailler aussi : « oser s’exprimer en ayant pour destinataire un maître que je ne connais pas », et ça, ce n’est pas simple pour un enfant. Et puis, je pense, des compétences de compréhension : il doit… il doit se remémorer l’histoire, il doit l’imaginer, il doit se plonger dedans. C’est le discours de narration qu’on fait beaucoup travailler au cycle 2 – lui, il est au cycle 1, mais il se débrouille très bien, il le travaille déjà.

J’ai des collègues qui utilisent les histoires que je mets sur le podcast, en soutien scolaire par exemple. Et j’ai une autre collègue de CM1 qui l’utilise directement dans sa classe : elle fait écouter les histoires à ses élèves et je sais que ses élèves rejouent les histoires. Elle leur demande de faire acteurs, de mémoriser le texte, de jouer des saynètes en classe devant les autres. Elle les fait également dessiner certaines parties de l’histoire et je crois qu’elle s’en sert ensuite comme support à l’expression écrite. Donc elle utilise l’oral comme support de l’écrit, pour ensuite rentrer dans l’écrit. Il y a beaucoup, beaucoup d’exploitations possibles. Ce n’est pas simplement l’enfant, le soir ou sur la route des vacances, qui va utiliser le podcast avec papa ou maman. Ça peut aussi être des professeurs qui ont envie de se lancer dans un projet de classe, en partenariat à distance avec moi, et je leur répondrai bien évidemment.

J’ai commencé ce podcast en novembre 2021 et là, je commence à arriver au bout de tout ce que j’avais produit. Je continue à écrire et à enregistrer, mais je diffuse plus rapidement que ce que j’enregistre, donc j’aurais besoin de gens pour m’aider, pour m’épauler, pour écrire avec moi. Des acteurs, ce n’est pas trop difficile, j’en trouve autour de moi, même en Jordanie, un pays qui est peu francophone, il faut le dire. Mais trouver des gens qui pourraient écrire, qui auraient envie, pour faire vivre le podcast, ça, ça m’aiderait beaucoup et ça me ferait plaisir aussi.