Une rame de métro un soir d’hiver est, aux yeux de Cortázar, un lieu chargé de mystère. Deux mains gantées qui s’agrippent à la barre comme si elles agissaient indépendamment de la volonté de leur propriétaire lui suffisent pour ressentir l’inquiétant, pour faire jaillir le fantastique : héroïnes de Cou de petit chat noir, elles y dansent une pantomime tendre et sinistre. Une jeune fille prise en auto-stop sous la pluie crépusculaire de Kindberg catalyse le désintérêt à vivre d’un voyageur d’âge mûr. Dans la nuit transparente d’Été un couple désuni ne partage plus que l’angoisse, pendant qu’un cheval blanc rôde autour de leur maison isolée et semble vouloir y pénétrer. Ce nouveau recueil de nouvelles — le quatrième à paraître en France — illustre de façon éclatante cette faculté de franchir les miroirs, de percevoir l’envers de l’événement le plus banal et d’en discerner la portée vitale qui est le propre de Cortázar. Telles les faces d’un prisme qui captent et réfractent chaque rayon lumineux, ces huit nouvelles s’emparent de la réalité quotidienne, la fractionnent en milliers de particules infimes pour lui donner une dimension inattendue. L’écrivain, ici, ne se contente plus de la surface des choses : il leur confère un volume qui conduit le lecteur dans cet espace inexploré où se situe la véritable relation entre hommes. GALLIMARD, coll. Du monde entier.
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