Stratégie et planification : Cities réinvente le jeu de construction de ville. Simple d’accès mais profond dans ses mécaniques.
Article écrit par Clément. Adepte des jeux rapides, son pire ennemi est le paralyseur. Spécialiste des jeux de plis, des casse-têtes et des ours. Il a deux chats, trop de plantes et une mémoire défaillante. Devise : « Faut que ça poppe ! »
Cities
Avertissement : Dans un souci de transparence envers notre communauté, nous tenons à préciser que cet article reflète notre opinion personnelle sur le jeu. Nous n’avons reçu aucune contrepartie de la part de l’éditeur du jeu. Nous avons acquis et testé le jeu de façon indépendante, sans lien commercial avec son éditeur. Les avis présentés ici représentent notre analyse honnête et impartiale du jeu, basée sur notre propre expérience.
En bref :
- Un excellent équilibre entre hasard et planification, idéal pour les parties en famille ou entre amis
- Un jeu de placement d’ouvriers accessible qui renouvelle le genre de la construction de ville
- Une mécanique simple mais profonde, permettant des parties rapides et stratégiques
Qui n’a jamais rêvé de construire sa ville idéale, sans les contraintes de la réalité ? C’est possible, avec Cities.
Je ne sais pas pourquoi, j’ai l’impression d’être abonné aux jeux de ville. Et je commence à avoir du mal à trouver de nouvelles choses à dire en préambule de mes articles. Je vous ai déjà parlé de mon amour pour SimCity et ses dérivés, d’architecture, de planification urbaine, de métro et de transports en commun, et j’en oublie sûrement. Ça devient compliqué de ne pas se répéter, au risque de lasser le lecteur. Est-ce parce qu’il y a beaucoup de jeux qui utilisent ce thème, ou parce que le rédacteur en chef a un biais qui le pousse à me confier ces jeux ? Peut-être est-ce un peu des deux. Il est certain que le thème de la ville est porteur dans le monde des jeux de société. C’est un thème « facile », qui parle à tout le monde et qui transcende les barrières culturelles.
Une ville reste une ville, qu’elle soit en Europe, en Asie, sous les tropiques ou en Laponie. On y retrouvera les mêmes éléments : des rues, des bâtiments d’habitation, des espaces publics. Et parfois, de l’eau, que ce soit une rivière, un lac ou la mer, l’espèce humaine n’aimant pas beaucoup se retrouver sans aquifère à proximité. Il y a sans doute un lien avec le fait que l’être humain ne peut pas survivre sans eau, mais je laisserai aux scientifiques le soin de discuter de ce point.
Nos 7 jeux préférés de construction de ville
Une autre caractéristique commune à toutes les villes est la présence d’attractions dans l’espace public, qu’il s’agisse de jeux pour enfants dans un parc, d’un rond-point décoré ou d’une statue devant la mairie. Là encore, c’est sans doute un atavisme humain, où chaque groupe cherche à construire son appartenance à travers un ou des objets et références communs.
Comme son nom l’indique, Cities est un jeu de conception et de construction de ville, pour 2 à 4 joueurs ou joueuses. En tant qu’urbanistes, les adversaires vont chercher à concevoir la ville la plus adaptée aux contraintes fixées, tout en essayant de la rendre la plus attractive possible.
Le jeu se déroule autour d’un plateau central qui présente les objectifs communs, au nombre de trois. Chaque objectif rempli rapporte des points, en fonction de l’ordre dans lequel il a été accompli (le maximum pour le premier ou la première, un peu moins pour le second ou la seconde, encore moins pour le ou la troisième, et rien pour le ou la quatrième). Les objectifs varient selon la ville et s’articulent autour de la hauteur des immeubles et du plan de la ville (rues parallèles, taille des parcs…).
Le plateau contient également 4 rangées de 4 cases. La première ligne contiendra les objectifs personnels (3 faces visibles et 1 face cachée), la deuxième les tuiles de ville (3 faces visibles et 1 face cachée), la troisième les tuiles attractions (2 dans la première case, 1 dans les deux suivantes, et 2 dont 1 face cachée dans la dernière), et la quatrième ligne les bâtiments (4 dans la première case, 3 dans les deux suivantes, et 2 secrets dans la dernière).
Les cartes d’objectifs personnels décrivent des objectifs (qui se rapportent aux bâtiments) et un nombre de points marqués par objectif rempli.
Les tuiles villes sont découpées en 4 cases, de 3 types différents :
- Les parcs, en vert
- L’eau, en bleu
- Les rues, en gris
Les rues contiennent, au centre de la case, un carré de couleur (bleu, jaune, vert ou rouge) qui détermine la couleur du bâtiment constructible sur la case.
Les tuiles attractions font la taille d’une case de tuile ville. Il y a 4 types d’attractions pour les parcs et pour l’eau, ainsi que des monuments (qui se posent sur une case rue) et des tuiles « joker » qui transforment une case rue d’une couleur en case rue neutre, sur laquelle n’importe quel bâtiment peut être construit, quelle que soit sa couleur.
Les bâtiments sont de 4 couleurs différentes (bleu, jaune, vert ou rouge) et sont empilables.
Chaque joueur et joueuse reçoit 4 ouvriers (8 à 2 joueurs ou joueuses), 3 marqueurs pour les objectifs communs, un marqueur de score, ainsi qu’une tuile ville de départ. Les tuiles de départ sont choisies par les joueurs et joueuses, en commençant par le dernier ou la dernière.
Le jeu se déroule en 8 manches (4 à 2 joueurs ou joueuses). Lors de chaque manche, les joueurs et joueuses vont, dans l’ordre du tour, poser un ouvrier sur une case du plateau principal et prendre le contenu de la case pour le jouer aussitôt. Chaque joueur et joueuse ne peut placer qu’un seul ouvrier par rangée (2 à 2 joueurs ou joueuses).
Si la case est dans la rangée objectifs, le joueur ou la joueuse prend la carte et la pose face visible à côté de sa ville.
Si la case est une tuile quartier, le joueur ou la joueuse la place face visible dans sa ville. La tuile placée doit être adjacente à une tuile déjà présente, et les grilles formées ne peuvent pas dépasser 3 tuiles sur 3. Il n’y a pas de contraintes sur les types de cases adjacentes (parc, eau ou rue).
Si la case est dans la rangée attraction, le joueur ou la joueuse prend la ou les tuiles attractions et les pose immédiatement sur sa ville. Les tuiles attractions eau ne peuvent être posées que sur des cases eau vides. De même pour les tuiles attractions parc, qui ne peuvent être posées que sur des cases parc vides, et les monuments, qui ne peuvent être posés que sur des cases rue vides. Si il ou elle ne peut pas poser une tuile, celle-ci est retirée du jeu.
Si la case est dans la rangée bâtiments, le joueur ou la joueuse prend les bâtiments correspondants et les place immédiatement sur sa ville. Les bâtiments doivent être posés sur une case de la couleur du bâtiment (ou neutre) ou sur un bâtiment de la même couleur, dans la limite de 4 étages. Si le joueur ou la joueuse ne peut pas placer un bâtiment, il est retiré du jeu.
Le joueur ou la joueuse qui place son ouvrier sur la 4e case bâtiment tire deux bâtiments au hasard du sac bâtiments et deviendra premier joueur ou première joueuse au tour suivant.
À la fin de son tour, le joueur ou la joueuse vérifie s’il ou elle a rempli un ou plusieurs des objectifs communs et place un marqueur sur ceux qui le sont, sur le nombre vide le plus élevé.
Quand tous les joueurs et joueuses ont placé leur dernier ouvrier et effectué leur dernière action, chacun(e) récupère ses ouvriers et le plateau est réapprovisionné.
Fin de partie
La partie prend fin après la 8e manche (4 à 2 joueurs ou joueuses), lorsque la ville atteint la taille de 3×3 et que tous les ouvriers ont été placés. On additionne alors les points gagnés avec les objectifs communs et ceux gagnés avec les objectifs personnels, ainsi que des points bonus pour les monuments (2 points par monument) et les attractions (1, 3, 6 ou 10 points, selon le nombre d’attractions dans une même zone). Le joueur ou la joueuse avec le plus de points remporte la partie.
Matériel
On peut noter une certaine dissonance dans les matériaux qui composent Cities. Les plateaux, tuiles et cartes sont en carton, ce qui est assez classique. Les ouvriers et marqueurs sont en bois, et même en bois plutôt travaillé. Le jeton premier joueur est particulièrement réussi, avec une forme d’étoile, et les marqueurs d’objectifs ne sont pas en reste, avec leur cercle évidé coloré. Et à côté de cela, on a les bâtiments en plastique. Et même pas en bon plastique. Certes, leur forme est plutôt réussie, et il faut que les pièces soient empilables. Mais ce n’est pas comme s’il était impossible de faire des pièces en bois empilables qui tiennent. C’est pour moi un point noir du jeu.
Au niveau graphique, rien à redire de particulier. Le plateau central est peut-être un peu chargé sur les bords, mais ce n’est pas gênant pour le jeu. Le verso des cartes objectifs est dans l’air du temps, puisqu’il représente un dos de smartphone, outil principal de la consommation touristique moderne. Les couleurs sont le seul moyen de différencier les pièces, ce qui pourra rendre le jeu compliqué pour certains daltoniens.
Le livret de règles est concis, ne faisant que 4 pages. Il est donc assez dense, mais cela ne nuit pas à sa compréhension. Les différentes étapes sont numérotées ou alphabétisées, et les illustrations, bien que peu nombreuses, sont pertinentes et présentes à bon escient. Les objectifs, s’ils sont nombreux et divers, sont suffisamment clairs sur les cartes pour qu’il n’y ait pas besoin d’explications supplémentaires dans les règles.
Cities, verdict
Il ne faut pas chercher l’originalité de Cities dans son mécanisme. On est ici en présence d’un jeu de placement d’ouvriers classique, sans grande différence avec les autres jeux de ce type. On peut noter quand même deux points :
- L’obligation qui est faite aux joueurs et joueuses de placer un ouvrier dans chaque rangée
- Les objectifs personnels qui s’ajoutent automatiquement à chaque tour
La première partie est (quasiment) obligatoire pour que le jeu fonctionne. Les joueurs et joueuses devant avoir 9 tuiles (et pas une de plus ou de moins) à la fin de la partie, il faut donc s’assurer que tout le monde prenne une tuile ville par tour. De cela découle logiquement la suite, qui est l’obligation de prendre une case par rangée. Il est vrai que le jeu aurait pu se faire sans cette contrainte des 9 tuiles, mais il aurait alors été moins équilibré, et sans doute moins intéressant.
Moins intéressant car moins « complexe ». Cities est un jeu qui va demander aux joueurs et joueuses de planifier et réfléchir, mais aussi de s’adapter, avec ces objectifs personnels qui apparaissent au fur et à mesure. Il faudra savoir bien les choisir pour optimiser le score final. Mais choisir son objectif, c’est aussi limiter son choix dans les autres rangées, si les adversaires jouent d’abord les tuiles ou les bâtiments. L’équilibre est subtil et il faudra trouver le juste mélange. De la même façon, il est parfois payant de jouer l’inconnu (les cartes et tuiles face cachée), mais c’est un risque à prendre. Le mécanisme de désignation du premier joueur ou de la première joueuse de la manche suivante est relativement classique, avec une pénalité double (moins de bâtiments et une part de hasard dans le tirage).
Cities a un côté frustrant, puisqu’il ne sera pas possible de tout faire, et que les choix se limiteront au fur et à mesure, la planification de la ville se figeant au cours de la partie du fait des contraintes. La frustration viendra aussi des autres joueurs et joueuses, qui ne prendront jamais la « bonne » tuile, mais celle que nous voulons. L’interaction existe dans Cities mais elle est froide, et se limite à la concurrence pour les ressources et les objectifs communs. Cela n’empêche pas de garder un œil sur le développement des adversaires, pour les gêner, ou au contraire identifier qu’ils ou elles n’iront pas chercher telle ou telle case convoitée, et qu’il est possible de se focaliser sur une autre priorité ce tour. Ceci est particulièrement vrai pour les cartes objectifs.
Si Cities ne révolutionne pas le genre, et oui, il ressemble beaucoup au tout récent Tower Up, il est néanmoins très réussi. Les règles sont simples, s’expliquent et se comprennent vite, le jeu est fluide, la stratégie est présente, avec une part de hasard. Cities est simple sans être simpliste, complexe sans être compliqué, c’est un jeu qui pourra se jouer avec toutes sortes de joueurs et joueuses, en famille ou entre amis. Les parties sont rapides, le décompte des points n’est pas prise de tête, les 8 villes proposées apportent de la diversité, il sera tout à fait possible d’envisager des revanches et des belles, sans lassitude ni dégoût.
On a aimé :
- La simplicité des règles (même votre cousin qui déteste lire les règles va comprendre)
- La rapidité des parties (parfait pour ceux qui s’endorment après 30 minutes de jeu)
- La beauté des villes construites (même si elles ne respectent aucune norme d’urbanisme)
On a moins aimé :
- Les bâtiments en plastique (on dirait des pièces de Monopoly qui ont mal tourné)
- La frustration de voir LA tuile parfaite partir chez l’adversaire (top 10 des causes de disputes familiales)
C’est plutôt pour vous si…
- Vous rêvez d’être maire mais sans les manifestations
- Vous aimez construire des villes sans permis de construire
- La stratégie ne vous fait pas fuir mais vous préférez quand même dormir la nuit
Ce n’est plutôt pas pour vous si…
- Vous êtes architecte et allergique aux approximations
- Votre devise est « Plus c’est long, plus c’est bon » (coucou Civolution)
- Vous détestez quand les autres joueurs et joueuses contrarient vos plans parfaits
Un jeu de placement d’ouvriers simple sans être simpliste, complexe sans être compliqué, avec un thème vendeur. Cities prouve qu’on peut être maire d’une ville en 30 minutes, et ça, c’est déjà une sacrée promesse électorale !
Excellent !
Note : 5 sur 5. Cities chez Philibert Cities chez Play-inSuivez toute l’actualité de Gus&Co sur la chaîne WhatsApp de Gus&Co.
- Date de sortie : Novembre 2024
- Langue : Française
- Assemblé en : Chine
- ITHEM : 3 sur 5. Pour en savoir plus sur l’ITHEM dans les jeux de société, c’est ici.
- IGUS : 2 sur 5. Pour en savoir plus sur l’IGUS dans les jeux de société, c’est ici.
- EcoScore : E. Si vous voulez en savoir plus sur l’EcoScore dans les jeux de société, c’est ici
- Label Dé Vert : Non. Pour en savoir plus sur le label Dé Vert, c’est ici.
- Création : Phil Walker-Harding Steve Finn
- Illustrations : Jorge Tabanera
- Édition : Iello
- Nombre de joueurs et joueuses : 2 à 4
- Âge conseillé : Dès 10 ans
- Durée : 45 minutes
- Thème : Ville et tourisme
- Mécaniques principales : Construction, placement d’ouvriers et objectifs. Pour en savoir plus sur les différentes mécaniques de jeux, c’est ici.
Rejoignez notre communauté :
Rejoignez notre chaîne WhatsApp
Depuis 2007, votre fidélité a façonné notre blog sur les jeux. Pour rendre votre expérience de lecture toujours plus agréable, nous avons choisi un espace sans publicité, nous entretenons toutefois des relations d’affiliation avec Philibert et Play-in, nous touchons une petite commission lorsque vous achetez un jeu depuis notre site. Notre indépendance se nourrit de votre soutien, et chaque contribution, petite ou grande, fait une réelle différence.
En donnant via Tipee, vous nous aidez à enrichir notre contenu et à partager notre passion pour les jeux de société. Votre soutien nous permet de continuer cette belle aventure ensemble. Merci pour votre générosité et pour faire partie de notre communauté dédiée aux jeux, sous toutes ses formes. Ensemble, continuons à explorer l’univers ludique !
L’article La ville selon Cities : Simple, stratégique et addictif est apparu en premier sur Gus & Co.