David Marmier a rencontré Jérôme Wybon, réalisateur et documentaliste cinéphile, pour parler de sa toute première bande dessinée : Les Mâchoires de la Peur. Publiée chez Huginn & Muninn dans la collection Biopik, cette BD retrace l’épopée aussi chaotique que mythique du tournage du film Les Dents de la mer de Steven Spielberg. Un ouvrage immersif, foisonnant et passionnant.
Une passion pour les coulisses du cinéma
Jérôme Wybon n’en est pas à son coup d’essai. Auteur de nombreux documentaires consacrés au cinéma et à ses figures marquantes, comme Jean-Paul Rappeneau ou la troupe du Splendid, il aime explorer les coulisses, les archives et les petites histoires derrière les grandes. Il dirige aussi une collection de blu-ray chez StudioCanal consacrée au cinéma français des années quatre-vingt. "On me dit souvent que je suis un archéologue du cinéma, et j’aime beaucoup cette idée", confie-t-il.
Les Dents de la mer : chaos en haute mer
Pour inaugurer la collection Biopik, l’idée d’un album sur le film culte de Spielberg s’est imposée. Non seulement parce que Les Dents de la mer fête son cinquantenaire, mais surtout parce que son tournage, sur l’océan et sans effets spéciaux numériques, fut un vrai cauchemar. Requins défaillants, acteurs sur le départ, grèves menaçantes et budget explosé, Steven Spielberg aurait dû être renvoyé. Mais les rushs, brillants, l'ont sauvé. "Le tournage a changé Hollywood, mais Spielberg en garde un souvenir douloureux", révèle Jérôme Wybon.
Une bande dessinée cinématographique
"Ce qui m’a séduit, c’est qu’on pouvait faire vivre les scènes, les incarner", explique Jérôme Wybon. À la différence d’un documentaire où l’on recueille des souvenirs, la BD permet de raconter en direct. Scénarisée avec minutie, à partir de sources vérifiées, elle reconstitue des moments-clés comme la gifle réelle reçue par Roy Scheider sur le plateau. Le dessin de Tony Cittadini, en vert délavé et rouges stridents, crée une ambiance unique. "Il a nourri chaque case, avec des idées de mise en scène proches du cinéma", souligne Wybon.
Un documentaire graphique
Avec ses 192 pages, Les Mâchoires de la Peur se lit comme un making-of à grand spectacle. Certaines doubles pages ralentissent le rythme pour faire respirer l’intrigue et mieux savourer la tension. La dernière partie, très forte, donne la parole à un scientifique sur la représentation des requins. Une façon de réhabiliter ces animaux injustement diabolisés depuis le roman de Peter Benchley, qui consacra ensuite sa vie à leur défense.
Des suites déjà prévues
La collection Biopik ne fait que commencer. En 2026, deux autres BD sont annoncées : l’une sur L’Exorciste, l’autre sur Terminator. Si Les Mâchoires de la Peur est signée par Jérôme Wybon, les prochaines seront confiées à d’autres auteurs, avec toujours le même souci du détail et de la transmission.
Infos pratiques
Les Mâchoires de la Peur
Collection Biopik - Éditions Huginn & Muninn
Scénario : Jérôme Wybon
Dessins : Tony Cittadini
Parution : décembre 2025
Pages : 192
Prix : 24,95 €
Photo: David Marmier
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