Derrière chaque scène magnifiquement éclairée ou chaque cadre saisissant se cache le travail minutieux d'un directeur de la photographie. Aujourd'hui, Romain Lacourbas, membre de l'Association Française des Directeurs de la Photographie Cinématographique (AFC), nous convie dans l'univers fascinant de son métier avec cette interview de David Marmier pour La radio du cinéma.

Une vocation découverte par hasard

L'histoire de Romain Lacourbas avec le cinéma commence à l'adolescence, bien loin des chemins tout tracés que ses parents envisageaient pour lui. "Ce que je préférais, c'était aller dans les salles obscures," confie-t-il. Le déclic survient à 15 ans, lorsqu'il rencontre, dans un train, une connaissance qui lui parle des écoles de cinéma. Bien que Romain n'ait jamais intégré la Fémis ou Louis-Lumière, il poursuit son chemin via une école privée, avant de décrocher un stage providentiel sur un film de Jean-François Stévenin.

« C’est à ce moment-là que tout a vraiment commencé, » explique-t-il, « aux côtés de Pierre Aim, qui m'a appris mon métier avec beaucoup de bienveillance. »

Le rôle clé du directeur de la photographie

Souvent considéré comme le "traducteur visuel" du réalisateur, le directeur de la photographie joue un rôle crucial. "Il s'agit de mettre à l'image ce que le réalisateur imagine, de sublimer le récit sans jamais le surpasser," explique Romain Lacourbas.

Ce travail commence bien avant le tournage, lors de longues sessions de préparation. La compréhension du scénario, les discussions avec le réalisateur, les repérages des lieux, et les choix techniques sont des étapes essentielles. Chaque outil, qu'il s'agisse d'une grue ou d'un simple travelling, est décidé en fonction des besoins narratifs.

Romain met également en avant l'importance de son équipe, de l'assistant caméra au chef machiniste, en passant par le technicien de l'image numérique (DIT). "C'est un travail d'équipe, une véritable pyramide hiérarchique," souligne-t-il.

Entre petits budgets et superproductions

Romain Lacourbas a travaillé sur une multitude de projets variés, allant des films français intimes aux blockbusters internationaux. Il cite notamment sa collaboration avec Olivier Megaton sur des productions comme Colombiana et Taken 2, qui lui ont ouvert les portes d'Hollywood. "Les Américains sont assez binaires : ils rappellent les gens dont ils ont entendu parler," dit-il en souriant.

Malgré son expérience dans les grosses productions, Romain apprécie aussi les projets plus modestes. "Sur des budgets plus petits, il faut être encore plus réfléchi dans ses choix. Chaque décision compte," affirme-t-il. Cette dualité entre grand spectacle et cinéma d'auteur enrichit son approche.

L’art de se réinventer

Pour Romain Lacourbas, chaque film est une nouvelle aventure. "Le but est de repartir d'une page blanche à chaque projet," explique-t-il. Il voit dans les contraintes techniques ou budgétaires une opportunité de se renouveler. "C'est souvent dans la contrainte que la création prend tout son sens."

Actuellement, il alterne entre projets français et internationaux. Parmi ses dernières collaborations, il cite Ballerina, un spin-off de la franchise John Wick, avec Ana de Armas et Keanu Reeves. En parallèle, il travaille sur Matha, un film français de Rachel Lang, qu'il qualifie de "plus personnel et introspectif."

Le partage et la transmission

Membre actif de l'AFC, Romain Lacourbas valorise le partage d’expérience. "L’association est un lieu d’échange et de transmission, avec des événements comme les masterclass et le Micro Salon," explique-t-il. Il est également très impliqué dans les festivals de cinéma axés sur la photographie, comme Camerimage en Pologne ou les Manaki Brothers en Macédoine.

Une passion intacte

Quand on lui demande son film préféré, Romain cite Emilia Perez de Jacques Audiard, un film qui l’a récemment marqué. Quant à sa réplique favorite, elle vient du film Sur mes lèvres de Jacques Audiard : "On va jusqu’au patin ou quoi ?" Une phrase qu’il trouve d’une étonnante indélicatesse, mais qui illustre bien la subtilité des dialogues.

Avec son approche unique et sa capacité à naviguer entre des univers variés, Romain Lacourbas continue de réinventer son art à chaque projet, tout en restant fidèle à sa passion pour l’image et l’émotion qu’elle peut transmettre.

Photographie: David Marmier pour la radio du cinéma