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Les soldats ennemis étaient en fuite.
On pouvait apercevoir au loin, là où la plaine devenait plage puis océan, les derniers véhicules amphibies de l’armée royale tenter de lamentablement prendre le large, des hommes en uniforme agrippés à leurs flans, sans chef, abandonnant de nombreux matériels de guerre sur la plage.
Les chasseurs léger et les canons mobiles harcelaient les fuyards tandis qu’une longue colonne de prisonniers s’étirait vers les montagnes où de grandes cavités sûres leur serviraient de geôle jusqu’à nouvel ordre, sauf s’ils décidaient de se joindre à la révolution.
Evoluant lentement au milieu des véhicules et de ses hommes heureux, Benkana ne pouvait absolument pas partager la joie de ses subalternes: un ou deux fidèles écartaient d’ailleurs les guérilleros, voulant remercier le chef qui les avait mené à la victoire, en bredouillant quelques vagues excuses de fatigue..
..Quand la réalité était tout autre..
Nous étions sur l’ile d’Okagwam, un an et demi avant la chute de la Royauté. Ce lieu était stratégique: une partie du minerai destiné aux usines du Texos, et provenant des grandes carrières de l’Est, passait au large dans des porte-containers géants. L’ile avait été envahie une première fois par les rebelles, puis reprise par l’armée régulière et venait enfin d’être libérée par un régiment des steppes neigeuses de l’extreme nord, dirigés par la Chef Benkana ( qui n’avait pas encore gagné ses gallons de commandant ).
Le regard pointé vers l’horizon infini marin, ses cheveux en bataille lui passant parfois sur le visage, elle finie par stopper sur la crête d’un petit monticule qui dominait la plage, ses lieutenants attendant sagement quelques pas derrière elle. Au loin de petites explosions ponctuaient la retraite des royalistes.. Benkana serra les dents, dévoilant ses canines et bientôt toute sa dentition, ses paupières s’écartant comme pour laisser sortir ses yeux de leurs orbites, et une face enragée, exultant de haine et de douleur se dépeignit sur tout son visage tandis que ses mains crispées froissaient le message arrivé une demi-heure plus tôt qui annonçait l’assassinat de son père, celui qui l’avait élevé et qu’elle croyait à l’abris derrière les lignes rebelles.
Un filet de sang coula le long de ses lèvres, elle ne s’en préoccupa pas, laissant les quelques gouttes perler jusqu’à son menton ou le vent les détacha, tels des pétales d’une rose vivante emportées vers le large.
La Commandant se releva brusquement dans le lit, aspirant de grandes bouffée d’air faisant gonfler sa poitrine nue et saillante comme si elle allait étouffer.
Lentement elle reprenait ses esprits, tentant de reconstituer le décor autour d’elle, quand un léger froissement et un mouvement dans les draps la fit prendre pleinement conscience du lieu et du temps: elle était Aurora Benkana, Commandant du Transporteur n°7 de l’Exode, sa compagne Azala était à ses coté, il faisait nuit et..
Ses doigts s’enfoncèrent avec violence dans les draps épais, les tendons sous pression.
La tête rentrée dans les épaules, Aurora leva les yeux de haine vers le lustre au dessus du lit, et se souvînt: l’agent 12, l’assassin de son père, était à bord de son vaisseau, et il était hors de question qu’elle puisse y survivre..
Adénor Kerichi, mécanicienne dans une sous-station du Transporteur n°7, était devenue la maitresse du Lieutenant Phil Goud qu’elle avait aidé durant le sauvetage de la Princesse Azala, arrachée des griffes d’un odieux Maître Mental Pirate sur les quais de la station “Maman Lolo”. Suite à un repas en tête à tête, Benkana avait reconnu en elle la terrible Agent 12, une tueuse à gage aux ordre de l’ancien régime Royaliste, qui avait exécuté de nombreux chefs rebelles, dont le père d’Aurora.. Cela s’était passé il y a plusieurs années maintenant, et Benkana avait perdu l’espoir de la retrouver. Evidement juste après le tête à tête, Adénor Kérichi avait disparu de ses quartiers, et son fiancé l’attendait encore six heures plus tard dans son appartement, endormi dans le canapé, en slip, avec une bouteille de champagne éventé à la main, quand les miliciens de Benkana avaient enfoncé sa porte.
Dehors les passages dimensionnels se succédaient autour du Transporteur, la navigation semblait stable sur la route de l’ultime rendez-vous général de l’Exode avant le grand bond dans l’inconnu: la passe de Magellone.