Red Universe Tome 1 Chapitre 28 Épisode07: « Déclaration »

Xopilat’l se tenait aussi droit que possible, supportant les douleurs qui marquaient son corps de nombreux hématomes. Entouré de dix gardes armés comme en première ligne d’un champ de bataille, il attendait l’ouverture du sas. Juste au moment où celui-ci s’écarta, un choc dans ses côtes lui rappela combien la haine de tous les militaires de Ti’ltchiti demeurait toujours vivace, malgré sa capture. On lui souffla à l’oreille:
« Espèce de merde, j’espère qu’ils t’en feront baver. On sait mâter les Zlabots comme toi, ici... »
L’officier en tête du peloton jeta un œil sévère au soldat derrière Xopilat’l et celui-ci recula pour reprendre sa place. Mais aux ricanements qui fusaient plus ou moins en catimini autour de lui, alors que la petite troupe progressait dans le large corridor, il ne s’agissait pas de se faire d’illusions. Le responsable reprochait surtout à son subordonné de n’être pas plus discret, quand aux regards de ceux qui croisaient le convoi, ils ne sauraient être plus explicites.
Le navire-prison Hualtollohuit s’était spécialement rapproché de la planète Cuitliē pour prendre livraison, en urgence, de son plus dangereux et important colis de ces dernières années : le Président de la République cachée de Chilico. La nouvelle avait parcouru tout le système, occultant les dures conditions de travail, s’imposant dans les réunions familiales et, bien sûr, faisant les gros titres des journaux multivisuels. Le gouverneur No’ork Kelm’tek avait même reçu un message de félicitations de la Parlementaire Loxa, membre du Comité de salut public actuellement au pouvoir dans la capitale : Ti’ltchiti.
Après quelques minutes de marche et quelques crachats de provenance inconnue, le groupe s’arrêta devant une porte à double battant gardé par trois miliciens visiblement tendus. Le col de leurs uniformes serrait les goitres, caractéristiques des Nalcoēhuals, à la limite de l’étouffement que l’on pouvait déterminer au teint aigue-marine de leurs visages. On présentait que les habitants de Chilico possédaient une couleur de peau d’un bleu plus foncé et des arcades sourcilières plus proéminentes que les Nalcoēhuals dits « normaux », ce qui en faisait bien évidemment une sous-race pour certains. Xopilat’l n’avait jamais vraiment remarqué de différence notable, pourtant, mais cela importait peu dans l’esprit des racistes de tout ordre.
Deux coups dans chaque genou et le Président s’effondra alors que les battants s’ouvraient sur une salle assez large pour contenir la cinquantaine de journalistes invités pour l’occasion. Cette fois, l’officier responsable montra son mécontentement manifeste et, d’un signal psychique, il congédia les neuf soldats. Celui qui l’avait frappé au premier sas n’eut que le temps d’ajouter avant de s’éloigner, goguenard :
« On se retrouvera en enfer, président d’opérette. »
Deux des sentinelles de l’entrée s’approchèrent et l’aidèrent à se relever, sous les flashs des appareils holographiques. Cela fit naitre une remarque dans l’esprit de Xopilat’l :
« Est-ce que je suis dans un cirque de Zlabot, ou une arène, ou les deux ? »
Toujours soutenu par les gardes, Xopilat’l progressa dans l’allée maintenue ouverte devant lui par des cordons de sécurité. On lui criait des questions à distance, quand ce n’étaient pas des insultes qui cognaient contre ses barrières Mentales. Les flashs et les projecteurs baignaient ces quelques mètres jusqu’au jury de préséance en un chemin de lumière.

Il aurait pu s’accouder à l’estrade devant lui, mais son honneur comme sa fonction ne le lui permettait pas. C’est donc droit et fier, serrant les dents, que le Président de la République cachée de Chilico fît face à ses accusateurs. Du haut de leur promontoire, plusieurs personnalités de l’armée, de la justice et de l’administration le dominaient de leurs regards suffisants. Au centre, le gouverneur, Kelm’tek, bien entendu, à sa gauche le procureur Chcat’l, bien connu des sympathisants séparatistes pour son impitoyable haine envers toute forme de contestation. Les autres n’étaient que des subalternes qui considéraient leur présence en ce lieu comme une reconnaissance de leur statut dans ce système stellaire. Ceci étant dit, on avait donc concentré ici la crème des instances dirigeantes de Chilico et ce n’était pas anodin.
« Un peu de calme ! ordonna le gouverneur alors qu’un grand gond résonna pour ramener le silence dans la salle. Nous sommes réunis en cet endroit pour énoncer à Xopilat'l Aktar les différents motifs d’accusation qui le conduiront au tribunal d’exception. »
Un hologramme de dessina au-dessus des jurés et une liste sans fin s’y déroula, où l’on retrouvait un peu de tout et n’importe quoi. Le gouverneur poursuivit :
Inculpé Aktar, vous devez tout d’abord nous donner votre opinion sur cette liste de... griefs. Puis nous vous demanderons sous quelle forme vous désirez plaider votre culpabilité : volontaire ou involontaire. Suivant ce choix, les preuves à produire de votre innocence devront procéder de voies différentes.
...
Vous ne dites rien ? s’étonna le gouverneur. Vous n’ignorez pas que parmi vos accusations, plusieurs sont liées à des actes de sédition et de rébellion envers l’état, ce qui vous prive malheureusement de l’assistance d’un avocat. Seules vos paroles seront donc inscrites aux minutes de cette préséance.
Toujours aucune réponse. Sombre, Xopilat’l laissait ses larges pupilles jaunes glisser sur chaque participant, comme s’il les prenait à témoin de cette parodie de justice.
Le gouverneur semblait tout de même bien embarrassé que le prévenu ne réagisse pas ou, comme on l’attendait, ne se lance pas dans une longue litanie révolutionnaire qui aurait achevé de le décrédibiliser. Il échangea tour à tour à voix basse avec ses voisins, tandis que quelques flashs crépitaient à nouveau dans la salle. Le procureur hocha placidement de la tête, donnant visiblement son approbation à la proposition de Kelm’tek qui reprit la parole :
« Ce jury de préséance accepte donc le silence de l’inculpé comme l’aveu d’une culpabilité volontaire. Nous réunirons le tribunal des intelligences artificielles d’ici trois déciles pour passer à l’étape suivante de la procédure. Je pense que si personne n’a autre chose à ajouter, nous pouvons clore cette... »
Soudain, les portes à doubles battants que les gardes avaient consciencieusement refermées s’ouvrirent, laissant entrer plus d’une trentaine d’inconnus armés de paralyseurs. Point commun entre eux : ils portaient tous des vêtements de prisonniers. Derrière le jury lui-même, une demi-douzaine d’autres apparurent, tenant immédiatement les convives en joue. Xopilat’l lança un salut au soldat qui l’avait insulté et frappé de manière si véhémente lors de leur arrivée : Telma’k, son ami de longue date, avait joué son rôle à la perfection.
Mais, mais... que se passe-t-il ? maugréa le gouverneur en tentant de se lever. D’une main ferme, Telma’k l’obligea à se rassoir alors que la voix du président tonna dans la salle, imposant le silence.
Je vais donc prendre la parole puisque vous me l’avez si gentiment demandé, Gouverneur !
Il se tourna vers le public, composé principalement de journalistes qui avaient désormais tous allumé leurs enregistreurs, et poursuivit :
« Depuis le Hualtollohuit, un symbole de l’oppresseur de Ti’ltchiti parmi d’autres, je déclare officielle la création de la République de Chilico. En tant que président intérimaire, en attendant la tenue de prochaines élections, j’annonce la fermeture immédiate de toutes les mines, raffineries et entrepôt de stockage de « Pierres qui chantent ». Plus aucun vaisseau cargo ne s’éloignera de notre nouvelle république s’il contient ne serait-ce qu’un gramme de ce précieux matériau. L’Ordre des dockers libres verrouille en ce moment les installations, nos partisans disséminés dans l’administration transmettent les ordres et nous ordonnons à l’unique bâtiment militaire nalcoēhual en fonction dans ce système stellaire de se rendre ou de le quitter, sous peine de se retrouver partout interdit d’escale.
Je vous remercie, mesdames et messieurs, de transmettre ce message au plus grand nombre, pour annoncer la bonne nouvelle. »
Depuis son promontoire, le siège du gouverneur fut secoué, signe qu’on exigeait qu’il se redresse. Devant l’air abasourdi qu’il lançât à Telma’k, celui-ci lui adressa son plus beau sourire et le contacta psychiquement :
° Vous étiez tellement obnubilé par le président que vous n’avez pas tenu compte des soldats qui l’accompagnait, ni des dizaines de petites mains qui travaillaient laborieusement dans les rouages de ce vaisseau-prison depuis des années.
Le plus drôle, c’est que vous avez patiemment regroupé ici des milliers de nos militants, nous n’avons eu qu’à ouvrir les geôles. Tout cela au nez et à la barbe de vos services secrets qui pensaient si crânement nous tenir sous leur joug. °
Inspirant un grand coup, il poussa Telma’k et le procureur devant lui pour passer la porte. Dans le couloir, des dizaines et des dizaines d’autres anciens prisonniers les attendaient, l’air menaçant. L’ami de Xopilat’l ajouta :
° Remerciez le président, il m’a demandé de garantir de votre sécurité. Personne ne vous touchera donc... °
Et c’est sous une pluie de crachat que les membres du jury de préséance parcoururent la distance les séparant des geôles, où ils avaient précédemment placé tous les condamnés.

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SOUTENEZ REDUNIVERSE ! Prod: podshows, Réa: Raoulito, Relecture: iGerard,TheDelta,Coles - Acteurs : Bohort: narration, Hazalactus : Xopilat'l, Gvillaume : Telma'k, Numa : Gouverneur Derush/montage : Zizooo,Ackim, Musiques: VG, Ian, Cleptoporte, Pia

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