Red Universe Tome 1 Chapitre 28 Épisode 12 : « révélations »

La parlementaire nalcoēhuale reprit la parole :
Il sera de nouveau opérationnel d’ici quelques cycles, notre république sait engager les moyens nécessaires à l’accomplissement de ses plans.
C’est aussi cela « la Frayeur » ? interrogea Azala, ayant déjà une idée de la réponse.
Loxa considéra la princesse quelques secondes, comme si elle complétait petit à petit un profil psychologique en vue de monter un dossier.
C’est un concept politique qui consiste à mettre en accusation ceux que l’on appelle « les ennemis de la république et les suspects ». Notre patrie est en danger à la suite du passage de vos amis, à la trahison de l’Empereur-Dieu de Ragnvald et à l’invasion de ces humains mentaux. Plus personne ne peut être neutre, chaque citoyen se doit de tout donner pour la survie commune !
Je vois, commenta pensivement Azala. Donc, être absent à son travail...
... est considéré comme un acte de rébellion contre la cause ! s’enhardit soudain Loxa en frappant du poing sur la table. L’Amiral Huate est auprès des armées afin de purger le haut commandement et de lutter contre les accapareurs ! Il y a trop de rumeurs et de défaitisme dans notre grande nation, nous DEVONS réagir et nous ressaisir. Mais pour cela, les espions, les menteurs et les traitres à la solde de Ragnvald doivent être DÉBUSQUÉS ET ÉCRASÉS sans aucune pitié.
IL EN VA DE NOTRE SURVIE !

Melba et la princesse échangèrent un regard. À un moment de l’Histoire où il aurait fallu le sang froid d’une personne comme feu la Parlementaire Ci’chi, c’était l’exact opposé et la pire configuration possible qui se présentait. Une folle, totalement délirante, se trouvait à la tête de la République nalcoēhuale, elle avait à sa botte une formidable armée et des kilomètres de paranoïa à calmer dans le sang et la fureur. En face, les soldats humains les plus fanatisés, à la tête d’une gigantesque armada, avançaient inexorablement au contact, dirigés par un ambitieux mégalomane, régicide et... parricide.
Azala nota que Loxa semblait trop dépassée par sa propre hargne pour tenter de suivre leurs pensées. C’était plutôt une bonne nouvelle, vu que leur existence à Melba et elle dépendaient entièrement de la politicienne.
Et donc, comment pourrions-nous vous aider ? demanda-t-elle aussi négligemment que possible.
Vous serez nos intermédiaires avec les humains. Lorsque nous voudrons les informer d’une décision, ce sera votre voix qui sera entendue.
Je suis heureuse que vous acceptiez de négocier avec...
Qui parle de négocier ? la coupa sèchement Loxa. Sous la menace récurrente des humains, j’ai jugé qu’il était temps de reprendre ce qui nous était dû.
Un froid glacial remonta l’épine dorsale des deux femmes assises face à la Nalcoēhuale. Celle-ci se leva de son fauteuil et se tourna vers le miroir. L’image d’une petite portion de la coque du Calcatli grossissait, révélant au centre un espace interne d’atterrissage aux multiples éclairages. Vu d’Azala, la silhouette en tenue militaire noire se découpait sur les lumières des projecteurs. Cela lui rappela une série de cauchemars qu’enfant, elle avait eu le malheur de connaitre. C’était à la suite de la lecture d’un ancien recueil religieux conservé au cœur de la bibliothèque Royale, d'un texte parlant de sceaux, de chevaux et d’une bête. Cela disait... disait quoi, déjà ?
Un petit avertisseur clignota et Loxa se retourna presque par dépit pour le presser. Une voix monta alors des hautparleurs aux angles du bureau, immédiatement traduite par les dispositifs que portaient en permanence Melba et Azala.
Ici Huate.
Amiral, c’est une bonne surprise, s’exclama Loxa. J’ai justement face à moi nos deux invitées à qui je venais d’expliquer, à grands traits, nos projets concernant... Veora. Pouvez-vous nous confirmer que les lignes de production fonctionnent ?
Oui, madame, j’appelais à ce sujet. Les crédits ont été multipliés par deux et je suis fier de vous annoncer que les ouvriers font preuve d’un patriotisme exalté au vu du danger que nous courrons. Les cadences n’ont jamais été aussi élevées et j’ai devant moi la quatrième unité de fabrication des Lan’huitls.
Parfait ! Vous entendez ? chuchota Loxa à ses deux hôtes sous le ton de la confidence. Quatre unités de production, conçues en moins d’un cycle et demi !
Et... pouvez-vous expliquer à nos invités en quoi cela consiste, Huate ? Je vois sur leur visage qu’elles ont hâte d’en comprendre les implications.
D’ici deux cycles ce seront quarante Lan’huitls qui seront prêts à partir au combat, puis quatre-vingt dès le cycle suivant, puis encore cent-vingt unités. Finalement, cent-soixante nouveaux appareils sortiront à chaque cycle, lorsque nos lignes de production tourneront à plein régime.
On sentait clairement que le haut gradé vivait son rêve d’enfant à aligner ainsi les chiffres vertigineux. Loxa poursuivit le questionnement dans une sorte de comédie préparée à la seule intention de Melba et Azala ; tous deux semblaient y prendre une satisfaction qui paraitrait puérile, s’il ne s’agissait de personnages si importants. Et les réserves suffiraient-elles compte tenu des évènements de Chilico ? Réponse : oui. Et les marins expérimentés supervisaient-ils la formation des nouvelles recrues ? Réponse : oui, bien sûr, etcétéra, etcétéra...
« Deux des quatre. »
Cette remarque jaillit de l’esprit d’Azala telle une murène-cigale des profondeurs, suivie par le fameux paragraphe qui l’avait tant traumatisé durant sa jeunesse, en entier.

« Alors je vis que l’Agneau avait ouvert un des sceaux, et j’entendis l’un des quatre animaux qui disait d’une voix de tonnerre : Viens et vois.
Je regardai donc, et je vis un cheval blanc, et celui qui était monté dessus avait un arc, et on lui donna une couronne, et il partit en vainqueur, pour remporter la victoire.
Et lorsque l’Agneau eut ouvert le second sceau, j’entendis le second animal qui disait : Viens, et vois.
Et il sortit un autre cheval qui était roux ; et celui qui le montait reçut le pouvoir de bannir la paix de la terre, et de faire que les hommes se tuassent les uns les autres ; et on lui donna une grande épée.
Et quand l’Agneau eut ouvert le troisième sceau, j’entendis le troisième animal, qui disait : Viens et vois. Et je regardai, et il parut un cheval noir, et celui qui était monté dessus avait une balance à la main.
Et j’entendis une voix qui venait du milieu des quatre animaux, et qui disait : La mesure de froment vaudra un denier, et les trois mesures d’orge vaudront un denier ; mais ne gâte point ni l’huile ni le vin.
Et quand l’Agneau eut ouvert le quatrième sceau, j’entendis la voix du quatrième animal, qui disait : Viens, et vois.
Et je regardai, et je vis paraitre un cheval de couleur pâle ; et celui qui était monté dessus se nommait la Mort, et l’Enfer le suivait ; et le pouvoir leur fut donné sur la quatrième partie de la terre, pour faire mourir les hommes par l’épée, par la famine, par la mortalité, et par les bêtes sauvages de la terre. »

Alors que les battants extérieurs se refermaient sur les deux navettes dans un lourd roulement d’engrenages puissants, Azala s’escrimait vainement à effacer cette question de son esprit :
« Deux sur quatre, deux sur quatre... qui sont les deux autres ? »

*

Planète MaterOne,
Palais de la chancellerie, 3 h 15 du matin.

« RALATO, VIENS M’AIDER ! RALATO  ! »
La voix de Poféus se répercuta le long des couloirs vides du grand bâtiment. La souffrance tiraillait chacune des syllabes prononcées suffisamment fort pour entrainer le réveil en sursaut du premier cercle de secrétaires particuliers.
« RALATOOOO ! hurla encore Poféus, RA-LA-TOOOOO ! »
Rapidement, un branlebas de combat illumina toute l’aile du palais, on accourait, armé ou non, vers la chambre centrale où résidait le maitre de ces lieux. La serrure était fermée à clé, mais personne ne répondant aux appels et les hurlements se poursuivant, on décida d’enfoncer la porte.
« LAISSE-MOI CALANDE, LAISSE-MOI ! RALATO, AU SECOURS  ! »
Sous la pression de plus d’une dizaine de personnes, le battant céda dans un craquement déchirant et tous pénétrèrent dans la pièce. Il faisait sombre, seuls des pleurs à demi étouffés indiquaient la position du chancelier, mais une étrange odeur âcre emplissait l’air ambiant à le rendre suffocant aux nouveaux arrivants. Lorsque le premier secrétaire activa le contacteur près de l’entrée, l’horreur de la scène les frappa brutalement. De larges flaques rouges tachaient les tapis, les murs étaient trempés de sang et, au centre du lit, une vision d'épouvante. Un corps gisait, abominablement mutilé, les bras en croix, s'offrant à la vue de tous tel une fleur écarlate. Sa peau avait été arrachée, ses viscères déchirés à coups de dents, certains organes pendaient sur les côtés, ses intestins étaient étendus jusqu’aux pieds du sommier. Ceux qui ne s’enfuirent pas immédiatement de terreur, ou pour vomir à l’extérieur, tournèrent leurs regards vers la forme recroquevillée dans l’angle, à demi caché sous une partie du drap gorgé de sang. Le Chancelier Poféus, nu, les yeux grand ouverts à la limite de l’affolement, mastiquait nerveusement un morceau du foie de la Capitaine Fakir.
« C’est elle, c’est... c’est CALANDE ! Elle me veut du mal... beaucoup de mal ! Elle a dit...
Non, vous... vous ne comprenez pas, elle est terrible !
... vous ne comprenez pas, non, vous ne pouvez pas...
... Ralato... amenez-moi Ralato...
JE VEUX RALATO, MAINTENANT  ! »

Fin du chapitre 28

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