"Presque le silence" , un jour d’attribution du Prix Goncourt, voilà qui résonne avant tout par contraste comme l’accueil réservé au troisième roman de Julie Estève. Pour lui, peu de tambours et nulle trompette à la dernière rentrée d’hiver, martelée à grand coups d’anéantir sur l’enclume Connemara. Au moins les amoureux des belles lettres purent-ils choisir entre bestseller de droite et triomphe éditorial de gauche. Et oui, ami lecteur, tout connard s’empressant d’accoucher d’un papier sur le Houellebecq dont la version audio dure 45 minutes participa au phénomène à sa propre échelle, fût-elle modeste. Symbole édifiant, la librairie où j’obtins une – mémorable – dédicace de l’autrice de Presque le silence a fermé depuis.
Une sorte de Zazie en vacances à la campagne
C’est qu’on est en France, mon bon Monsieur : on a tous un grand-père résistant, on aime le cinéma d’auteur comme les téléfilms imbéciles, et on publie trop de bouquins. Sur ce dernier point, il faut choisir ses batailles. C’est qu’on ne peut pas payer les clips diffusés dans nos halls de gare par JCDecaux pour des douzaines de titres, tout le monde en conviendra. Les coûts du marketing s’envolent, le papier est devenu une ressource rare, on pourrait même un jour rémunérer les auteurs. Choisir ses batailles, donc. Celle pour Presque le silence n’a pas eu lieu.