Mission encre noire Tome 21 Chapitre 269. Chemin de croix d'Hervé Gagnon paru en 2017 aux éditions Libre Expression dans la collection noire. Patrick Kelly peste dans sa Honda Civic 2009. Il est coincé à l'heure de pointe, comme chaque matin dans les embouteillages monstres de Montréal. Ancien agent du SPVM devenu détective privé, il gagne sa vie là où les autres passent leur temps à la perdre, maris volages, pères mauvais payeurs...Tout va changer lorsque Claire Black, une religieuse dans la trentaine va mettre un pied dans son agence. Elle recherche un vieux crucifix volé ayant servi à invoquer le diable. Stéphan Doré, son vieux complice au SPVM, est intrigué par la piste que suit Patrick Kelly, alors que des corps écorchés se multiplient dans des églises de Montréal. Hervé Gagnon s'attaque à un polar de facture plus classique et c'est plutôt réussi. Rites noirs, blues, Mickey Spillane sont au programme de la soirée puisque l'auteur est notre invité.
Extrait:«Robidoux craignait par-dessus tout que Satan profite des diableries de Havard pour les posséder tous. Il jeta un regard furtif sur la dizaine de participants. Ils étaient blêmes de peur, mais avaient accepté d'être là parce qu'ils avaient des faveurs à solliciter. Chacun d'eux était susceptible d'être pris de remords et de le dénoncer le matin venu. Le risque était énorme, mais il était trop tard pour reculer. Havard de Beaufort se tourna et toisa l'assistance. Il avait le visage luisant de sueur. Le cordonnier eut un malaise en apercevant son air exalté.

  • Nous allons procéder! annonça-t-il enfin d'une voix autoritaire.» Tout homme est une nuit de Lydie Salvayre paru en 2017 aux éditions du Seuil. Lydie Salvayre a dû gérer la pression de publier un roman suite à l'obtention de son prix Goncourt en 2014 avec Pas pleurer. Rappelons que l'autrice a vécu tout cela alors qu'elle était gravement atteinte d'un cancer. Que peut-on écrire dans ces conditions après un Goncourt ? Un livre direct et batailleur. Anas souffre d'un cancer, Il quitte tout pour s'installer dans le midi de la France. En guise de repos, il se trouve confronté au mépris et au rejet d'une partie des habitants. Lydie Salvayre décortique l'engrenage de la haine. Elle dresse un portrait au vitriol du racisme ordinaire, de la brutalité des faibles, de ce besoin de se soumettre à un chef de meute. La bête collective est mauvaise. Tout homme est une nuit, met en scène un drame qui se révèle un roman ravageur. Extrait:«Ce soir là, on évoqua les entourloupes politicardes des baratineurs qui nous gouvernaient, la pluie qui ne venait pas sur la terre qui avait soif, les femmes et leurs griefs le plus souvent biais et glissés sur un ton de vertu douloureuse, à vous rendre cinglés. On fulmina contre les gros qui mangeaient les petits depuis que le monde est monde, contre le boucan des mobylettes dont les adolescents démontaient les silencieux aux seules fins d'abréger leur sieste (qui était ici une religion), et contre l'inquiétant aveuglement de ces mêmes bêtas devant le contrôle total de leur vie par leur Facebook et leur Twitter où fièrement ils s'exhibaient comme des godasses en vitrine, et le pire c'est qu'ils en étaient fiers, mais quels couillons, quelles andouilles!» Une assemblée de chacals de S.Craig Zahler paru en 2017 aux éditions Gallmeister collection Néo noir. Le «Gang du grand boxeur» vit une existence plutôt paisible et rangée. Nous sommes en 1888, le quatuor rendu célèbre pour ses nombreux cambriolages de banque va se reformer le temps du mariage de l'un des leurs. Sauf qu'une ombre plane sur la petite ville de Trailspur dans le Montana. Un encombrant fantôme du passé menace de s'inviter à la cérémonie. Vous qui aimez les Westerns classiques, méfiez-vous, celui-ci va à cent à l'heure. Vous y trouverez des scènes à couper le souffle, certaines, pourraient bien vous rappeler l'extrème violence de Méridien de sang ou de la Horde sauvage. S.Craig Zahler apporte un sang neuf au genre. Une assemblée de chacals est une excellente tragédie primitive, classique et délicieusement transgressive. Extrait:«J, l'autre gars et moi sommes restés calmes et décontractés tout le temps qu'on a été à l'intérieur. On a quitté cette banque de Podunk avec plus d'argent qu'on en avait jamais vu de toute notre vie, même si ça n'était pas vraiment beaucoup. On campait dans les zones désertes entre les villes parce qu'ils nous cherchaient. Il faisait froid, mais on ne le sentait pas. Deux jours plus tard, on est allés dans une autre ville, on a acheté des chevaux, des vêtements et d'autres armes et on a mangé trois repas chacun tellement on avait faim. Pour la première fois de ma vie, j'étais fier de quelque chose que j'avais fait. J'imagine que ça te semble étrange, mais toute ma vie, j'avais eu l'impression que quelqu'un m'enfonçait ses éperons dans les flancs et, pour une fois, j'avais l'impression de l'avoir fait tomber de sa selle.»